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Carnet de Routes : virée en Vallée de Chevreuse avec l’Alpine A110 GT

Cinq ans après sa renaissance, l’Alpine A110 a eu droit à une mise à jour de sa gamme. Nous avons pris le volant de la version A110 GT, au cours d’une balade sur les belles routes de la Vallée de Chevreuse, au sud-ouest de Paris.


Road-Trip | La Vallée de Chevreuse

  • Distance : 60 km
  • Durée : 1h30 (sans pause)
  • Rythme : à votre guise
  • Saisons : toutes
  • Tracé : https://goo.gl/maps/G2NGTuk9J9ge9oAo9
Notre virée en Vallée de Chevreuse

Quand il s’agit de passer une belle après-midi sur les routes sans partir trop loin, les passionnés de bitume et de virages à deux ou quatre roues de la région parisienne ont un point de chute incontournable : la Vallée de Chevreuse. Au sud-ouest de la capitale, ce parc naturel à cheval entre Les Yvelines et L’Essonne est un poumon vert qui ravie les promeneurs, les cyclistes et… nous, les amoureux de l’asphalte. Tout ce petit monde se retrouve donc entre forêts, cascades, châteaux, villages typiques et vallées pittoresques : ce qui en fait aux beaux jours un eldorado où on y sera mieux coude à la portière que le couteau entre les dents.

Une Alpine et des virages : notre paradis à nous

Et pour nous accompagner dans cette balade à travers La Vallée de Chevreuse, nous avons choisi de repasser un peu de temps au volant de l’Alpine, dans sa nouvelle version GT. Une compagnie de choix lorsqu’il s’agit de passer du bon temps sur la route…

L’Alpine A110, déjà une légende

Tel un phénix qui a su renaître de ses cendres, le constructeur est revenu sur le devant de la scène en 2015, vingt ans après sa douloureuse disparition. Depuis 2017, elle est admirée et reconnue comme étant une réussite à la française et avait d’ailleurs séduit Mathias lors de sa sortie. Quatre ans après, la magie opérait d’ailleurs toujours.

Alpine surfe sur cette image « Made in France » qui lui va à merveille. Entre les logos bleu-blanc-rouge sur la carrosserie et dans l’habitacle, ou l’emploi de matériaux nobles comme le lin de Dieppe dans les enceintes du système Focal, on ne peut que féliciter ce jusqu’au boutisme patriote et cette recherche de la perfection dans l’élaboration d’une voiture si iconique et attachée à l’image de notre pays.

Elle arbore fièrement le drapeau tricolore !

Pour 2022, l’A110 a eu droit à une mise à jour de la gamme : A110, A110 GT, A110 S et A110 R, ainsi que l’arrivée de quelques raffinements à bord. L’A110 GT, donc,représente la vision ultime de la Berlinette. Tournée à la fois vers la performance avec une puissance de 300 ch, et le plaisir de conduire sur route avec le châssis de l’A110, elle s’annonce comme l’Alpine idéale à nos yeux. 

Retrouvailles enjouées

En route ! Nous partons de la charmante bourgade de Montfort-L’Amaury, où les ruelles pavées pleines de charmes mettent à rude épreuve nos lombaires. L’A110 GT est équipée des sièges Sabelt Confort de toute beauté qui témoignent à eux seuls de la philosophie de la voiture : ils sont légers et pensés pour une conduite sportive, sans pour autant nuire au confort. La suspension de la voiture est relativement sèche, mais on est parfaitement installé dans ces fauteuils.

Montfort-L’Amaury, point de départ de la balade

Dès les premiers kilomètres, le caractère unique de l’Alpine se dévoile. La D112, entre Montfort-L’Amaury et Gambaiseuil est une route taillée pour les sportives légères ; un terrain d’essai idéal pour re-découvrir toutes les qualités de l’A110. Passant de grandes portions avec de la visibilité à des passages sinueux et vallonés en sous-bois avec des compressions et changements fréquents d’appuis, les 5 kilomètres sont dignes d’un circuit.

Un châssis de référence

L’équilibre parfait de la voiture est ici pleinement exploité et l’A110 brille toujours autant par sa capacité à se faufiler dans le sinueux. Avec à peine plus de 1100 kg sur la balance, l’A110 GT perpétue cette philosophie de la légèreté absolue, composante majeure du plaisir de conduire il faut le dire. Les transferts de charges sont toujours très sains, la Berlinette virevolte de virage en virage avec panache et ne piège jamais son pilote.

La suspension, reprise de l’A110, offre le compromis absolument parfait entre confort préservé, grâce à un bon filtrage des imperfections, et rigueur redoutable avec un maintien de caisse sans critique. Le léger roulis latéral n’est jamais pénalisant, et la voiture ne plonge pas au freinage. On ne peste jamais non plus sur un supposé effet « sac à dos » du moteur placé à l’arrière, grâce à une réparation des masses soignée.

Avant le petit village de Gambaiseuil, le double S en descente se passe sans freiner, sur le couple. Un véritable régal tant l’A110 est communicative : on sent la voiture changer d’appui en toute fluidité et épouser parfaitement les virages en banking. Aaaah, ce que c’est bon !

La mangeuse de virages

L’A110 GT, une agréable compagne de route

La balade se poursuit au cœur de la forêt de Rambouillet : Saint-Léger-en-Yvelines où de nombreuses célébrités ont leur belle maison puis Les Bréviaires et son Haras National. Entre les chênes centenaires et fougères, l’asphalte absolument parfait permet d’apprécier les qualités routières et l’habitacle cossu de l’A110.

Recouverte de cuir marron, la planche de bord au design moderne et épuré n’a pas changé d’un soupçon. Les contreforts de porte sont toujours de véritables merveilles à regarder et à toucher, avec du cuir matelassé du plus bel effet et le petit logo qui fait toujours son petit effet. Les commodos de Clio et commandes de clim’ de Captur sont toujours de la partie, pour rappeler l’héritage industriel de l’Alpine et faire quelques économises d’échelle. Dans l’ensemble, le cocon de l’A110 GT est de très bonne facture, avec du cuir de qualité à profusion, des inserts et dos de fauteuils en carbone très qualitatifs et finalement très peu de plastiques moyens visibles. Rien de bien nouveau à se mettre sous la dent, me direz-vous là encore…

CarPlay, enfin !

Il faut se pencher sur le petit écran tactile un peu désuet de la planche de bord pour se rendre compte de la principale nouveauté, et pas n’importe laquelle : le « nouveau » système multimédia des Renault d’il y a quelques années, qui intègre Apple CarPlay et Android Auto (filaire). Un ajout ô combien attendu tant le GPS intégré est médiocre, et l’impossibilité d’installer un support téléphone proprement. Malheureusement, la prise en charge du smartphone sur l’écran de la voiture reste l’apanage des Alpine 2022 et ultérieures : aucun rétrofit n’est possible.

C’est moyen, quand on sait que Mazda et Porsche le permettent par exemple. L’A110 GT sent d’ailleurs un peu le poids des années arriver et souffre de lacunes d’équipements à ce tarif (près de 80 000 €) : pas de sièges chauffants, pas de régulateur de vitesse adaptatif ou de maintien dans la voie, pas de feux de route automatiques… 

Côté « vivabilité », le coffre sous le capot permet d’accueillir deux sacs souples sans encombre (ou une valise cabine), le coffre arrière garde au chaud près du moteur un autre sac souple et laisse même la place pour deux casques au cas où une escapade sur piste vous tenterait. À cela s’ajoute de la place derrière les fauteuils, et un astucieux emplacement pour charger ses appareils grâce à deux ports USB-A et une prise 12V entre les sièges. Alpine a également prévu quelques petits rangements supplémentaires très pratiques à bord via un pack d’accessoires. L’A110 peut tout à faire s’envisager pour partir en road-trip à deux.

Plaisirs d’antan

Le plat principal, au volant de l’A110 GT

Les Étangs de Hollande, creusés initialement pour contenir l’eau alimentant les fontaines du Château de Versailles, derrière nous, nous basculons de l’autre côté de la N10, qui sépare Les Yvelines en deux. Nous arrivons alors au plat principal de notre virée en Forêt de Rambouillet : la très belle D24 entre Auffargis et Cernay-la-Ville. Véritable Nordschleife locale, tout ce qui est intéressant, sur deux ou quatre roues, vient y dégourdir ses bielles le week-end.

La D24, plus belle route du coin

Tel un manège de parc d’attractions, l’amusement commence par une séance photo avant la sablière de Pontgrandval : un radar à 70 km/h en sortie de virage en guise de cadeau de bienvenue. Ensuite, la route tortille en toute fluidité au cœur de la forêt puis un exigeant virage à droite en bordure de l’Étang des Vallées demande un gros freinage avant d’enchainer sur une section bosselée, sinueuse et sans trop de visibilité.

La D24, cette pépite !

Ce terrain de jeu vous filera des papillons dans le ventre, avec tout ce qu’il faut pour travailler sa technique sans avoir besoin de rouler à 160 km/h. Les réjouissances se poursuivent jusqu’à un imposant portail en fer forgé sur votre gauche puis un mur en pierre sur quelques kilomètres.

L’A110 GT longeant le parc de l’Abbaye des Vaux de Cernay

Cette portion grisante de quelques kilomètres se trouve au cœur de la Vallée des Vaux de Cernay, dont la superbe abbaye et son parc sont actuellement en travaux. Lieu préservé et superbement restauré, je vous conseille d’y bruncher ou juste de vous y balader tant le temps semble s’y être arrêté.

Seules les vocalises des moteurs viennent troubler la quiétude du lieu. La D24 longe le parc de ce lieu millénaire et les accélérations à chaque sortie de virage résonnent le long du mur de pierre. L’A110 GT et son échappement sport qui pétarade participent d’ailleurs à ce joli concert mécanique à faire pâlir les écolos.

300 ch dans l’A110 GT, ça y est !

Côté moteur, d’ailleurs, l’A110 GT reprend la recette de l’A110 originelle : un bloc performant mais pas vraiment noble provenant de la grande distribution, en l’occurence de Renault avec son 1.8 TCe. Mais bon, de toute façon, la noblesse d’un moteur en 2023, on commence un peu à s’en carrer… La plupart des blocs atmosphériques à plus de 4 cylindres sont six pieds sous terre et les grosses batteries prennent petit à petit le pas sur la noblesse mécanique.

Pour marquer le pas sur l’A110, la GT compte donc 300 chevaux (à 6300 tr./min.) sous le capot. Cela permet déjà à l’Alpine d’atteindre le cap symbolique et « marketinguement » intéressant des 300 poneys, mais aussi et surtout d’améliorer encore ses performances. Le 0-100 km/h est désormais abattu en 4,2 secondes et les 340 Nm de couple (20 de plus) sont disponibles très tôt, de 2400 à 6000 tr./min.

Pourquoi tant de puissance ?

Le petit moteur turbo de l’Alpine n’a pas vocation à se savourer dans les tours et à tutoyer la zone rouge. Il se veut élastique et souple dès les plus bas régimes pour des accélérations bluffantes et reprises toniques. Le gain de puissance est à vrai dire peu perceptible au volant, et il faudrait avoir l’A110 et l’A110 GT côte à côte pour les comparer en temps réel. Dans les faits, l’Alpine ne manque jamais de puissance et offre un moteur performant et chantant. En mode Sport, l’échappement pétarade gaiement, ce qui participe à donner du caractère et à apporter encore plus de sportivité à bord.

Les 300 ch (et donc la GT) sont-ils pour autant nécessaires ? Pas vraiment à mon sens, tant l’A110 et ses 252 ch ne nous ont jamais fait dire que l’on manquait de puissance sur route ouverte. Mis à part en montagne, pour envoyer en sortie d’épingle et doubler en montant, le gain minime de couple et de puissance réelle ne sont pas assez démonstratifs pour justifier les 5000 € de plus.

La Vallée de Chevreuse et sa diversité de paysages

La D24 derrière nous, une partie de D906 roulante offre quelques minutes de répit. On re-bascule en mode normal : la direction perd tout de suite en précision avec un point milieu un peu flou. Cela permet toutefois de gommer les remontées d’information trop fréquentes du mode Sport, qui demande des corrections un peu trop fréquentes. Dans ce mode normal, le moteur et l’échappement se taisent et la boite de vitesse lisse les passages de rapports jusqu’au 7e pour ne pas trop consommer. 

Nouvelle route, nouveau terrain de jeu : on quitte la D906 pour rejoindre la tortueuse et vallonée D61. Difficile d’imaginer que l’on est encore en Île-de-France tant les paysages sont changeants. Au cœur d’une profonde forêt, des pifs-pafs débouchent sur une belle descente longeant un parapet et un petit ravin, puis des prés et gazons dignes des alpages se présentent avant d’arriver au cœur du hameau pittoresque de La Celle-les-Bordes au creux d’une vallée verdoyante. S’en suit une nouvelle portion boisée, plus rapide et dégagée, avant une grande étendue et des prés jusqu’au charmant village de Bullion.

Le gazon de la D61, avant d’arriver à La Celle-les-Bordes

Une boîte de vitesse toujours aussi réussie

Des virages à profusion, du relief, des freinages, des relances : de quoi solliciter comme il se doit l’excellente boite automatique Gertrag à double embrayage. Cette dernière a d’ailleurs été renforcée afin d’accepter sans crainte la hausse du couple de notre version GT. Avec des passages éclairs, tant à la montée qu’à la descente des 7 rapports, elle fait partie des meilleures boites automatiques du marché à mes yeux. À tel point qu’on ne se dit jamais qu’une A110 à boite mécanique nous manque. Au rythme élevé avec lequel il est possible d’emmener l’Alpine, pouvoir se concentrer sur la conduite et jouer des palettes plutôt que de se soucier d’un embrayage et d’un pommeau est loin d’être superflu.

Fonctionnant en parfaite symbiose avec la mécanique, la transmission fait passer à merveille le couple sur le train arrière. Aucun problème de motricité n’est à déplorer, même sur route humide, et les Michelin PS4 offrent un grip impérial. L’ESP se règle sur 3 positions en fonction de ce que l’on souhaite en faire, mais l’A110 ne sera jamais cette propulsion qui partira sans qu’on la provoque. Elle reste prévenante et saine, grâce notamment à son poids contenu. Le freinage performance est lui excellent, avec une progressivité agréable et un mordant rassurant dès qu’on rentre dans les freins. L’A110 est définitivement l’alliée parfaite pour rouler, peu importe le rythme.

Les étriers bleus, signes que l’on a pris le freinage performance

Bonne à tout faire

La partie finale de notre vadrouille approche : la vallée de Bullion derrière nous, nous remontons sur le plateau de Cernay-la-Ville par la large D149. « Un piège à permis », comme diraient certains, tant cette route permet d’atteindre des vitesses nous amenant en prison. L’Alpine est en plus une parfaite petite machine à rouler très fort : la poussée du moteur turbo est grisante et les rapports s’enchaînent à toute vitesse. Elle reste toutefois sensible au vent et sa direction en mode Sport nous remonte pas mal les bosses. Elle ne survole pas la route comme certaines et demande un peu de poigne pour la maintenir sur certaines portions à haute-vitesse.

Une croupe inimitable

Arrivés à Cernay-la-Ville, impossible de ne pas s’arrêter au Jardin Sucré, charmante pâtisserie niché au cœur du village, championne de France du macaron et créatrices de véritables bijoux (leur tarte pomme-vanille est à tomber). On fait le plein de joyeusetés culinaires, on le met dans le coffre avant de l’A110 pour garder ça au frais, et on repart en direction de la D91, qui traverse la Vallée de Chevreuse du nord au sud. L’A110 sait aussi bien rouler aussi vite qu’une supercar que servir au quotidien pour aller faire les (petites) courses.

La D149, « route à permis »

Déjà la fin de la balade…

On re-plonge alors dans une vallée encaissée, où cascades et rochers bordent une superbe route sinueuse (une fois de plus équipée d’un appareil photo étatique).

Attention aux multiples pauses photographie…

Continuez sur la D91 et arrêtez-vous alors en terrasse à Dampierre-en-Yvelines pour un Monaco bien rouge ou un thé glacé. Véritable capitale autoproclamée des passionnés d’automobiles et de moto de la Vallée de Chevreuse, cette bourgade voit sa population doubler le week-end. Aux beaux jours, posez-vous quelques minutes, voire quelques heures, face au château afin d’assister à un défilé de sportives, anciennes, supercars, hypercars et objets roulants en tous genres.

L’A110 GT au cœur de Dampierre

L’A110 GT, un véritable collector

Au milieu de ce petit monde des voitures passion, l’Alpine y a toute sa place. Aucune autre voiture n’attire autant la sympathie des gens : du cycliste au papy en C15 en passant par les motards, je ne compte plus le nombre de pouces levés et d’appels de phares reçus à son volant. Ses quatre gros yeux ronds lui offrent un regard reconnaissable parmi toutes. Mais l’Alpine renvoie surtout l’image d’une France qui sait faire des voitures réussies.

Un regard perçant, reconnaissable de loin dans le rétroviseur

En guise de clou du spectacle, ou de cerise sur le gâteau, quittez cette belle vallée et le charmant village de Dampierre par la D91 en direction du Nord, afin d’emprunter la célèbre « route des 17 Tournants ». Comme son nom l’indique, cette succession de virages très serrés en montée peut se faire tout en 3e, sur le couple, ou en fond de 2 avec du rythme. Un tour de manège sur un asphalte parfait pour terminer en beauté notre virée au volant de cette pépite.

Plus raffinée qu’une Toyota GR86, moins lourde qu’une Lotus Emira, moins chère et plus vivante qu’une Porsche 718 Cayman… Notre A110 GT bien optionnée et accessoirisée flirte avec les 80 000 €. Une note qui commence à être salée pour un petit 4 pattes turbo, mais le montant à sortir pour rouler dans quelque chose de véritablement abouti aujourd’hui.

L’Alpine A110, la meilleure

L’A110 GT est, à équipement équivalent, 5000 € plus chère qu’une A110. Le surcoût ne semble pas énorme, mais le recours aux 50 ch supplémentaires n’a rien d’un incontournable pour moi tant la différence au volant est mince. L’Alpine A110 GT est géniale, mais l’A110 était déjà excellente.

Gardez ce pécule pour vous organiser un bon road-trip ou choisir une couleur quasi-unique de l’Atelier Alpine, tant l’A110 « de base » suffit. Cette voiture est une ôde au plaisir de conduire, le témoin d’un savoir-faire automobile et le parfait héritage de l’A110 originelle. De belles routes, une auto légère, essentielle et déjà collector avant que sa version électrique ne l’éclipse : les plaisirs simples de la vie sont souvent les meilleurs.

Photos : Victor Desmet