Essais

Mercedes EQE : digne héritière de la lignée

Mercedes est le maître incontesté des berlines depuis plusieurs décennies. Une tradition incarnée par la Classe E, connue et reconnue dans le monde entier pour ses qualités. À tel point qu’elle sert souvent de modèle à tout un marché. À l’heure d’une transition vers l’électrique qui semble maintenant inévitable, le constructeur se construit petit à petit une gamme complète de modèles dédiés, dont notre Mercedes EQE.

Est-elle fidèle à la lignée des grandes berlines Étoilées et mérite-t-elle un tel pedigree ? La réponse est oui, et on vous dit pourquoi en cinq étapes.

Une berline statutaire

Charismatique et statutaire, telle doit être l’image d’une berline premium pour afficher son identité et affirmer son statut. Des caractéristiques que les Classe E ont toujours su incarner au fil des générations, et qui se vérifient encore aujourd’hui avec l’EQE.

Je dois avouer ne pas avoir été vraiment charmé par la berline au moment de son annonce l’année dernière… Avec ses porte-à-faux très réduits et un empattement interminable, son relatif manque d’équilibre dans ses proportions ne lui donnait guère d’élégance. Au revoir long capot et malle symétrique, le profil d’EQE est dicté avant tout par l’ingénierie et les « contraintes » d’efficience d’une berline électrique.

L’électrique façonne son look

La place sous le capot ne servant plus à grand chose, mettre les roues aux quatre coins de la plate-forme et jouir d’un empattement si long ne peut être que bénéfique à l’espace à bord, mais aussi et surtout à l’espace laissé pour les précieuses batteries. Ça n’a pas forcément les cotes habituelles de la berline tri-corps, mais dans notre configuration grise foncée et jantes de 21 pouces c’est bien mieux en vrai qu’en photo. L’ensemble est résolument moderne, et fait tourner les têtes. L’EQE a une belle présence sur la route, et son profil affiche une certaine classe.

La signature lumineuse entretient l’identité stylistique avec les autres modèles Mercedes, puisque très proche de la grande sœur EQS. Même si l’EQE semble être la seule EQ à ne pas être dotée d’un bandeau de LED au-dessus de la calandre. Cette dernière, d’ailleurs, n’est plus qu’une pièce de plastique noire recouverte d’une multitude de monogrammes du constructeur en plus du logo reconnaissable parmi cent. Un peu too much à mon goût, mais heureusement c’est en option.

Des prestations à bord impressionnantes

Avoir le sens de l’accueil est l’un des attributs clés d’une berline réussie. Fidèle à sa lignée, l’EQE incarne cette vision à la perfection. Le soin apporté aux matériaux et à l’ambiance générale de son habitacle est exempt de toute critique, au point de laisser KO ses rivales. Mercedes, fidèle à sa réputation, a mis un point d’orgue à marier avec brio un très grand soin de fabrication à une ergonomie exemplaire.

Recouvert de cuir et d’alcantara noir et gris surpiqués de rouge et parsemé d’inserts en aluminium, l’habitacle de notre EQE AMG Line incarne le premium moderne et avant-gardiste qui sied parfaitement à une berline électrique. La planche de bord en bois digne d’un yacht apporte une belle dose de premium à un cocon très sombre, mais heureusement inondé de lumière grâce à l’immense toit-ouvrant panoramique et de belles surfaces vitrées. 

Une ambiance soignée et moderne

La nuit, l’EQE capitalise sur une gestion assez impressionnante de l’ambiance lumineuse à bord pour transformer l’habitacle au gré de ses humeurs. On peut ainsi passer d’une couleur unique à des dégradés dynamiques, de la planche de bord aux contours des sièges en passant par les aérateurs et les portières. Un gadget devenu un incontournable, aussi drôle qu’agréable à utiliser. 

Autre raffinement, les audiophiles apprécieront le système audio Hi-Fi Burmester embarqué. Un régal pour les oreilles avec différents niveaux de spatialisation et d’égalisation qui permettent de se concocter une ambiance musicale de haute-volée. Cela participe à donner à l’EQE ce sentiment de pullman de la route avec laquelle on peut enchainer les kilomètres avec plaisir.

Les assemblages sont quasi-parfaits (un mauvais alignement entre la porte gauche et la planche de bord nous a empêché de dormir durant tout l’essai), mais chaque matériau est choisi avec goût et l’ensemble est cossu. Les habituelles commandes de sièges sur les portes chez Mercedes permettent de contrôler les très accueillants fauteuils chauffants, ventilés et massants dotés d’un appui-tête ergonomique. Le reste des commandes étant désormais relégué sur l’impressionnante dalle tactile verticale trônant fièrement au cœur de la console centrale. Quelques boutons tactiles de raccourci subsistent sous l’écran, mais l’ergonomie est désormais entièrement centralisée par les deux écrans.

Des passagers aussi choyés que le conducteur

À l’arrière, trois vraies places dotées d’un bel espace aux jambes et d’une excellente habitabilité (même pour les plus grands) attendent les passagers. Un réglage dédié de climatisation est disponible, mais les sièges ne sont ni chauffants ni ventilés. La malle, elle, propose 430 L de chargement. Un volume assez faible, amputé de 100 L par rapport à une Classe E, du fait en partie du porte-à-faux arrière très court. À bord, on peut néanmoins compter sur de larges espace de rangement, notamment entre les deux fauteuils avant où l’absence de boite de vitesse permet de libérer l’espace.

Moderne, bien conçu et résolument soigné, l’EQE sait recevoir et faire voyager dans un univers où le conducteur et les passagers sont choyés.

Une vitrine technologique

La Classe S et la Classe E ont toujours été des laboratoires de technologie, des modèles inaugurant des équipements de pointe ensuite répandus sur le reste de la gamme. En tant que porte-étendard de la division EQ, l’EQE est ainsi une véritable vitrine technologique du constructeur ; pour le plus grand plaisir des geeks et clients avides de gadgets et d’innovations. Ports USB-C partout, chargeur sans-fil, affichage tête-haute de compétition, navigation en réalité augmentée, météo et navigateur web à bord. On n’a pas Netflix et Disney+ comme chez Tesla, mais quelques jeux permettent de s’occuper pendant la charge.

Une fois après avoir joué avec les centaines de possibilité de colorisation de l’habitacle par des milliers de LED disséminées un peu partout à bord, on peut ainsi occuper son trajet avec le système multimédia MBUX de dernière génération. Depuis sa sortie en 2018 et d’autant plus avec cette nouvelle mouture, il est une référence en terme d’interface et de fonctionnalités. À tel point n’avoir même pas eu à utiliser Apple CarPlay ou Android Auto comme d’accoutumée pendant un essai.

La Mercedes 2.0 par excellence

Un premier écran derrière le volant laisse le choix entre plusieurs types d’affichages, avec un niveau de personnalisation poussé et des graphismes et animations aussi fluides que qualitatifs. Le tout se commande via des touches tactiles sur le volant : cela demande un peu d’adaptation, mais elles sont efficaces une fois assimilées.

L’autre gros morceau est bien évidemment l’imposante dalle tactile verticale de la console centrale. Hyper lumineuse et utilisant la technologie OLED, elle propose une interface soignée et on ne peut plus complète. Après avoir passé quelques minutes à configurer les raccourcis et compris l’ergonomie, on prend plaisir à l’utiliser et à profiter de l’éco-système proposé par Mercedes.

Voiture électrique oblige, le constructeur a intégré à l’EQE un planificateur de trajet intelligent prenant en compte les arrêts-recharge. Le système nous dit ainsi où et combien de temps nous arrêter pour reprendre des watts et arriver à destination avec le niveau de charge préalablement choisi. Fonctionnant en symbiose avec la carte de charge MercedesMe, il ne propose ainsi que des bornes compatibles (quasiment toutes celles croisées) et simplifie grandement l’expérience en rassurant l’utilisateur puisque le prenant par la main à chaque trajet. 

Les menus sont complets, et MBUX affiche ainsi la disponibilité de chaque borne, la fréquentation habituelle par heure, et le prix de la recharge avant même d’y arriver. Une fois proche d’une borne IONITY, plus besoin de badger : la voiture communique en NFC avec elle et il ne reste qu’à se brancher. Une expérience transparente identique à ce qui fait dans l’éco-système Tesla, et qu’il est agréable de retrouver ailleurs.

Un croiseur de référence

L’EQE est fidèle à la tradition des grandes berlines Mercedes, taillées pour enchainer les kilomètres sans broncher et dans un confort absolument incroyable. Équipée de la suspension pneumatique, le mode Confort porte son nom à merveille : l’amortissement est tout bonnement incroyable tant il semble avaler chaque aspérité et chaque ralentisseur. La voiture donne la sensation d’être sur un véritable coussin d’air tant elle survole la route et offre un confort magistral.

Dotée d’un vitrage double-épaisseur et de pneus à réduction de bruit (deux équipements en option), la grande berline offre alors une expérience de voyage de véritable pullman tant le silence à bord est marquant. Aucun bruit d’air et très peu de bruits de roulement, le cocon d’EQE invite à la détente en profitant des fauteuils massants, de l’éclairage d’ambiance et de l’excellent système son Burmester. Un véritable croiseur avec lequel effectuer de longues distances se fait avec plaisir.

Au volant, on peut compter sur toutes les aides à la conduite possibles et imaginables : les feux matrix-LED sont hyper efficaces, le régulateur de vitesse intelligent se cale parfaitement sur les panneaux (sans tenir compte de ceux des sorties), et la conduite autonome de niveau 2 ne nous a jamais fait faux bon en plus de 1000 km de voie rapide.

Le confort avant tout

On peut choisir parmi plusieurs modes de conduite, mais notre EQE 350+ n’est pas la sportive de la gamme. Laissant cela aux version AMG, elle préfère être menée avec douceur et à bon rythme plutôt que malmenée. Même si l’amortissement se raffermit en mode Sport, les mouvements de caisse restent prononcés et l’inscription en courbe est fainéante. Même si elle pèse 2400 kg et mesure près de 5 mètres, elle est dotée de roues arrières directrices qui offre une belle agilité dans le sinueux et permette un bon rayon de braquage en ville. Mais son truc à elle, c’est bien le mode Confort : une direction bien calibrée, un confort royal et une mission de grande voyageuse qu’elle assume parfaitement.

Le mode Éco vient quant à lui lui réduire la puissance du moteur et anticipe la topographie du terrain, les limites de vitesses à venir et les différents types de carrefours devant nous pour ralentir seul la voiture et grappiller ainsi de précieux kW et gagner des kilomètres d’autonomie. Cela agit à notre place sur le freinage et est un peu déroutant au début, mais cela fonctionne à merveille.

Une berline électrique aboutie

Restons dans les kW, justement ! Notre version 350+ est dotée d’un seul moteur, placé sur l’essieu arrière, de 215 kW/292 ch alimenté par une grosse batterie de 90,6 kWh (capacité nette). Avec près de 2,4 tonnes sur la balance et 292 ch, l’EQE n’est pas un foudre de guerre, mais ses 565 Nm de couple suffisent amplement à proposer des reprises efficaces et accélérations convaincantes. Elle ne colle pas au siège et ne nous retourne pas l’estomac comme une Taycan Turbo S, mais cela correspond parfaitement à ce pour quoi elle est faite : voyager.

Dans cette optique d’enquiller les kilomètres en sa compagnie, elle offre une autonomie théorique de 576 km (voire 674 km en ville). Dans les faits, il est très aisé de parcourir 520 km/530 km à son volant en une charge, et environ 420 km sur autoroute à 130 km/h. Niveau consommations, nous avons ainsi relevé 24,7 kWh/100 km à 130 km/h et 22,6 kWh à 110 km/h. Peu de voitures sont aujourd’hui capables de parcourir plus de 400 km sur autoroute sur une seule charge, et l’EQE fait parti des références du marché question autonomie et efficience sur voie rapide.

La grande voyageuse idéale

Côté recharge, la berline plafonne à 175 kW. Faute d’architecture 800 volts comme l’Audi E-Tron GT ou la Porsche Taycan, elle ne peut atteindre les 250 kW et réduire ainsi son temps de charge. Il faut ainsi rester environ 35 minutes pour passer de 10 à 80 % sur une borne DC, et 8h30 sur une borne AC en 11 kW. Partenaire du réseau Ionity avec un kW facturé 0,30 € contre 0,79 € pour « les autres », un plein (15 > 100 %, soit 400 km d’autoroute) coûtera alors 17 €. Intéressant !

Le système intégré MBUX est lui on ne peut plus complet : l’éco-système Mercedes avec la carte de charge et le planificateur de trajets fonctionnent de concert pour offrir une expérience clé-en-main aussi rassurante que confortable pour voyager sans crainte. Le constructeur ne s’est pas contenté de fabriquer un excellent produit, il a aussi créé autour tout une synergie de services pour accompagner les clients dans une transition tout en douceur vers l’électrique.

La Mercedes de demain est déjà là

EQA, EQB, EQC, EQE, EQS et EQV : du petit SUV à l’utilitaire en passant par de grosses berlines, il y en a pour presque tous les goûts dans la gamme watée de Mercedes. Un choix que BMW et Audi n’offrent pas encore, faisant de l’Étoile de Stuttgart un acteur majeur de l’électrique sur le marché du premium.

30 ans après la première Classe E, l’EQE apparait comme la digne héritière d’une lignée de routières qui a toujours servi de référence à travers le monde. Face à elle, bien peu de choses à confronter à part la Tesla Model S (qui n’est plus disponible actuellement), la BMW i4 bien plus petite et l’Audi E-Tron GT/Porsche Taycan, plus typée sportive. Vendue à partir de 83 150 € dans notre version 350+ (soit environ 10 000 € de plus qu’une Classe E thermique), la Mercedes EQE se sent ainsi bien seule dans un segment de grande berline premium électrique du marché assez pauvre à l’heure où nous écrivons ces lignes.

Elle est ainsi la pionnière d’un marché en devenir, et incarne à merveille cette vision de la grande voyageuse ultra-confortable et technologique. Reprenant tout le savoir-faire de la firme en matière de technologie embarquée et de soin apporté aux prestations à bord, elle dispose de tout ce qu’on attend d’une grande berline premium en ajoutant une partie électrique aboutie et complète qui fait d’elle une nouvelle référence.

Photos : Victor Desmet

Mercedes EQE 350+

On aime

  • Habitacle très soigné
  • Technologie embarquée
  • Confort magistral
  • Éco-système abouti
  • Autonomie remarquable

On aime moins

  • Coffre un poil petit
  • Comportement dynamique pataud
  • Tarifs salés