Essais

Kia EV6 GT : à l’assaut du Col de Turini

Turini. Ce nom seul évoque à lui seul la passion automobile. Un lien tout particulier entre ce col et le Rallye de Monte Carlo depuis toujours. De Sospel à L’Auberge des Trois Vallées, c’est là que Kia nous a invité à venir faire connaissance avec l’EV6 GT, son nouveau vaisseau amiral sportif.

Parmi tous les constructeurs qui se sont illustrés sur Le Turini, Kia n’y a jamais posé ne serait-ce qu’un pneu en n’ayant jamais engagé de voiture dans le championnat du monde des rallyes. On ne vient de toute façon pas vraiment en pèlerinage ici, même s’il y aurait de quoi écrire bien des lignes sur les lacets des différentes spéciales autour du col ou la fameuse tarte aux myrtilles de la mythique Auberge à son sommet.

Kia EV6 GT : la Kia la plus puissante de l’histoire (pour l’instant)

Bon, ça n’est pas vraiment dur de devenir la Kia la plus puissante de l’histoire du constructeur. À part la très exclusive Stinger GT, aucune Kia n’a jamais défrayé la chronique. On entend habituellement plus parler de Kia pour ses 7 ans de garantie et ses modèles sobres que pour une question de performance.

Mais voilà, Kia et Hyundai n’étant finalement qu’une grosse entité, les talentueuses équipes de la division N de Hyundai basées en Corée, mais aussi au Nürb’, se sont penchées sur l’EV6 pour lui offrir une version ultime. Quand on sait à quel point chaque Hyundai N est réussie (l’i30 N nous manque et l’i20 N est l’un de nos coups de cœur), on ne peut que partir confiants à la découverte de l’EV6 GT.

Kia EV6 GT : une Kia EV6 encore plus désirable

Coiffant la gamme de la voiture de l’année 2022, la version GT se veut bien évidemment être plus jolie et surtout plus racée que les finitions habituelles qui commencent à courir les rues, preuve d’un succès grandissant. Je dois avouer ne pas être fan de la partie arrière de l’EV6, un peu trop haute et chargée, avec des jantes trop petites pour donner un ensemble aussi aérodynamique que les premières images laissaient penser.

La copie est bien meilleure en GT, grâce principalement à l’arrivée de jolies jantes de 21 pouces et de Michelin PS4S taille-basse qui assoient comme il faut la voiture et dynamisent grandement sa ligne. Les étriers vert fluo annoncent le pedigree, tout comme l’arrivée d’une teinte grise matte qui sied à merveille aux lignes tendues de l’EV6. La version GT inaugure également un nouveau bouclier et une calandre inédite, pour rendre encore un peu plus méchante la berline/SUV/break (choisissez) dans le rétro’. Déjà bien née et dotée d’une identité stylistique bien à elle, l’EV6 et son profil atypique s’affirme encore un peu plus dans cette déclinaison sportive.

À bord, l’ambiance a elle aussi été adaptée pour coller à cette philosophie GT. De beaux sièges baquet en suédine, surpiqués du même vert fluo que les étriers, font leur apparition. Ça et là, des détails de finition métallisés et des inserts GT permettent de se rappeler que l’on est à bord de la version la plus sportive. Ce cocon est sombre, très sombre, et les faibles surfaces vitrées font que l’on se sent un peu engoncé sans toit-ouvrant. Cela contraste ainsi totalement avec la cousine IONIQ 5 dont elle partage la plate-forme.

Une Kia EV6 (presque) comme les autres

Mis à part le bouton GT vert fluo sur le volant, l’instrumentation et l’ergonomie reprennent en toute logique ce que l’on trouve sur une Kia EV6 de bon samaritain. Tout comme la très bonne habitabilité et le volume de chargement de 500 L, que vous pouvez retrouver dans notre essai ici.

N’ayant à ce jour pu essayer cette EV6 GT que sur notre portion fermée de 4 km sur le Col de Turini, nous esquiverons les habituelles mais ô combien nécessaires considérations de recharge, consommations, efficience, confort, aides à la conduite et tout ce bla-bla. Sachez toutefois qu’elle charge aussi vite (jusqu’à 275 kW) et qu’elle dispose de toute la dotation pléthorique en équipements d’une EV6 normale.

C’est bien de jouer, mais faut penser à recharger aussi…

Des performances de supercars 

Pour donner vie à l’EV6 GT, Kia compte sur deux moteurs électriques, un premier de 160 kW/218 ch à l’avant, et un second de 270 kW/367 ch à l’arrière. Le deux fonctionnant de concert combinent ainsi 430 kW/585 chevaux et offrent un couple assez impressionnant de… 740 Nm. Cela permet à l’EV6 GT de mouvoir ses 2,2 tonnes sans nous le faire sentir, avec un 0-100 km/h abattu en 3,5 secondes et 260 km/h de vitesse de pointe. Décoiffant !

Pour profiter de tout ce beau petit monde « sous le capot », Kia a eu la bonne idée de nous privatiser la portion finale de 4 kilomètres du col de Turini côté Sospel. Une aubaine, et de quoi pouvoir envoyer quelques watts sans trop se soucier de la maréchaussée mais aussi et surtout des chicanes mobiles, plus communément appelées usagers de la route, pouvant arrivant en face. Tels des pilotes de rallye, une petite pointe d’adrénaline avant le départ se fait sentir. En même temps il y a de quoi… Un gros jouet de près de 5 mètres de long de plus de deux tonnes et de 585 chevaux lâché sur un col on ne peut plus sinueux coincé entre un ravin et la roche, sans jamais l’avoir conduit avant, ça intimide. 

Bienvenue dans le paradis de Turini

Avant de s’élancer, comme toute bonne voiture moderne, l’EV6 GT nécessite quelques ajustements et réglages de modes de conduite. On appuie alors sur le bouton vert fluo « GT » du volant pour basculer dans un mode dédié, passant tout en mode Sport : suspensions, moteur, pédales, direction… On peut également se concocter un mode personnalisé afin de paramétrer à sa guise chaque élément.

Feu vert allumé, on s’élance et on profite alors de quatre kilomètres de spéciales au volant de l’EV6 GT. La première accélération est typique des sportives électriques : sans latence, linéaire et plutôt virulente, sans pour autant être aussi violente que celle d’une Tesla Performance. Rien ne ressemble de toute façon plus à mener un moteur électrique qu’un autre moteur électrique, laissant l’âme mécanique aux thermiques. Fermez les yeux, et vous ne savez pas dans quoi vous vous trouvez de toute façon. Les constructeurs ont beau bosser sur des signatures sonores spécifiques, mis à part un léger sifflement et le bruit de la gomme sur le bitume, rien ne vient troubler le silence à bord. Instant nostalgie, sur le Turini, le bruit d’une bonne mécanique bien attachante nous manque !

Reste que cela marche diablement fort, avec des accélérations et relances en sorties d’épingle qui nous collent au siège. Les 740 Nm de couple déboulent avec vigueur, mais ils passent parfaitement au sol grâce à la transmission intégrale et au grip des Michelin PS4S. Un différentiel électronique à glissement limité est également de la partie, et participe grandement à cette gestion impeccable de la motricité. Avec près de 600 ch, Kia EV6 GT joue dans la cour des grands et peu sans sourciller suivre un Porsche Taycan GTS ou une Tesla Model S Performance. 

Qui aurait parié, il y a encore dix ans, trouver une Kia et une Porsche jouer des coudes ?

Un châssis impérial

Proposer une débauche de performance avec de l’électrique est finalement chose aisée. Toute la subtilité est de réussir à faire cohabiter toute cette cavalerie d’ions avec une mise au point châssis aboutie et un bilan dynamique convaincant. Et force est de constater que la Kia EV6 GT est une excellente élève… Les équipes de développement de la division sportive Hyundai/Kia ont écumé des tours et des tours du Nürburgring pour mettre au point notre Coréenne supersonique, et une fois derrière le volant cela se ressent. Elle apparait comme aussi imperturbable que grisante à emmener.

Configurée en mode GT, la direction, consistante juste comme il faut et parfaitement communicative, permet de placer la voiture avec précision en entrée de courbe et révèle un train-avant incisif. Lâcher l’accélérateur fait légèrement plonger la voiture en avant, avec une mise en appui efficace et des transferts de charge étonnamment sains pour un bébé de près de 2200 kg. Une fois le museau placé, l’arrière se met à pivoter puis à enrouler comme par magie. Un comportement que l’on se plait alors à reproduire dans chaque épingle, en remettant les watts de plus en plus tôt tant la voiture est saine à mener et met en confiance. Le roulis est inexistant, et l’EV6 apparait comme imperturbable. Sécurité oblige, nous avons gardé l’ESP activé, mais celui-ci laisse un champ d’action plus que large avant de se faire sentir. 

Moins piégeuse que le très joueur Mustang Mach-E GT qui ne rechigne pas à partir en dérive à chaque sortie de courbe enjouée, la Kia EV6 GT laisse toutefois échapper que ça ne lui déplairait pas. Compte tenu de la topographie du col du Turini, et à moins de s’appeler Sébastien Lœb, nous ne daignerons pas essayer. Mais avec autant de puissance et un différentiel à glissement limité, la sportive rigoureuse et bonne élève doit aussi pouvoir assurer le spectacle à qui saura la maitriser.

Dans les enchainements sinueux, on profite de cet équilibre général bluffant et de sa propension à enchainer les virages sans broncher. Au volant, tant de puissance et un tel gabarit demandent de la concentration, mais on n’en oublie pas pour autant de prendre du plaisir. Bien calés dans les baquets, on se concentre alors sur notre trajectoire, entre l’intimidant vide derrière le fin parapet et la roche qui nous dit « bonjour », et on hausse le rythme au fil de la montée. 

Une montée de col et une voiture de plus de 2 tonnes nécessitent des freins à la hauteur, et je n’ai pas été déçu : avec des disques ventilés de 380 mm à l’avant et de 360 mm à l’arrière et un excellent mordant, ralentir l’EV 6 GT n’est pas aussi éprouvant que je le pensais. On compte en plus sur un freinage régénératif réglable sur trois positions via les palettes derrière le volant, efficace et « responsable » puisque permettant de récupérer quelques watts avant de les re-consommer dans cette débauche de puissance.

Kia, le pouvoir de surprendre

Avec l’EV6 GT, Kia continue à développer un modèle qui a déjà trouvé son public. En devenant la voiture de l’année 2022, l’EV6 a mis le constructeur sur le devant de la scène européenne et permis au crossover électrique de connaitre un début de carrière prometteur. Proposer une déclinaison sportive permet également à Kia de s’immiscer dans la cour encore assez fermée des véritables sportives électriques en tant que telles, qui offrent des performances impressionnantes, mais aussi et surtout un comportement convaincant et une mise au point aboutie. 

Face à elle, on peut ainsi confronter les quelques modèles premiums et bien plus onéreux qui existent en Europe : Mercedes EQE 53 AMG, BMW i4M50, Tesla Model S Performance, Audi E-Tron GT et sa cousine Porsche Taycan GTS. Kia se démarque ici comme à son accoutumée en affichant un prix inférieur de plusieurs dizaines de milliers d’Euros, puisque notre EV6 GT est affichée à 72 990 €.

Un rapport prix/performances absolument imbattable, mais surtout une démonstration de force de la part du constructeur qui déboule avec un modèle cohérent et véritablement convaincant sur la route. Il y a quelques années, le slogan de Kia était le « pouvoir de surprendre ». Aujourd’hui, cela prend tout son sens. Quelle claque !

Photos : Victor Desmet et Kia

Kia EV6 GT

9.5

9.5/10

On aime

  • Look soigné et sportif
  • Dotation pléthorique
  • Performances de supercar
  • Comportement routier de référence
  • Rapport prix-équipements

On aime moins

  • On cherche…