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Essai : DS 9 : Un pari risqué, mais réussi ?


La DS 9 au banc d’essai

J’ai toujours eu un faible pour les grandes berlines Françaises. Gamin, j’ai traversé l’Europe sur la confortable velours des banquettes arrière des Renault 25 puis Safrane : ceci explique sans doute cela. Malheureusement, les constructeurs Français n’ont pas cessé de perdre du terrain sur ce segment ces trente dernières années. Image en demi-teinte, mécaniques trop timides, qualité de finition décevante : les raisons pour expliquer ce désamour ne manquent pas. Pour un constructeur Français, il faut donc faire preuve d’une audace certaine pour se lancer aujourd’hui dans l’aventure « grande berline ». C’est pourtant le pari de DS, qui profite de ce début d’année 2021 pour commercialiser sa vision de la berline statutaire : la DS 9. J’ai eu l’opportunité de me glisser derrière son volant pour un essai dans les environs de Reims. Je vous livre mon avis, sans détour(s).

Une grande et élégante berline

A l’heure de la toute-puissance des SUV, on a tendance à oublier à quel point une berline peut être élégante et valorisante. A ce petit jeu, la DS 9 est une vraie réussite.

Accusant près de 5 mètres de long (4,93 m pour être tout à fait exact, contre « seulement » 4,57 m pour un DS 7 Crossback), la DS 9 offre tout ce qu’on attend d’une berline statutaire. Si vous êtes habitué aux productions DS, sa face avant ne devrait pas vous étonner : elle est similaire à celle du DS 7 Crossback, avec la calandre DS WINGS, et les feux LED à modules pivotants. Elle se distingue en revanche par un élément : le sabre chromé sur le capot, qui fait son apparition pour la première fois sur une DS de série.

Pour moi, c’est la vue de profil qui met le plus en valeur la DS 9. Avec sa chute de pavillon façon Fastback, sa ceinture de caisse rehaussée et ses poignées de porte affleurantes (qui se rétractent lorsqu’on commence à rouler), la DS 9 a une vraie prestance. A tel point qu’on a aucun mal à l’imaginer garée devant une ambassade, ou dans la cour de l’Elysée. Pour être tout à fait franc, je dois quand même concéder que le profil de la DS 9 a une ressemblance certaine avec une autre production du groupe Stellantis : la très belle Peugeot 508. Et pour cause, puisque la DS 9 repose sur la même plate-forme EMP2, dans une version rallongée.

L’arrière est d’un grand classicisme. A commencer par le choix de la malle de coffre au lieu du hayon : l’élégance y gagne, mais pour le coté pratique, on repassera. Si les feux à effet écaille apportent un bel effet de profondeur, j’avoue être moins réceptif aux sabres chromés qui soulignent les feux et qui s’étendent jusqu’aux ailes, un brin trop clinquants.

Clin d’oeil à la DS originelle, les cornets disposés aux extrémités du pavillon servent de feux de position latéraux. A noter enfin que le toit de la DS 9 est forcément contrasté par rapport au reste de la carrosserie (en l’occurence, il est noir).

Une ambiance intérieure vraiment spéciale

Pour reprendre les termes de la conférence de presse DS9, DS se targue d’incarner le savoir-faire Français du luxe automobile. Dubitatif ? C’est légitime, vu les griefs souvent opposés aux véhicules haut de gamme Français. La performance est donc d’autant plus remarquable : l’ambiance intérieure de cette DS 9 est une vraie réussite.

Quelque soit la finition adoptée, le soin apportée aux matériaux est remarquable. Un exemple parmi beaucoup d’autres : les rangements de la planche de bord sont tous occultés par des caches. La gamme DS 9 est divisée en deux finitions, qui proposent autant d’ambiances intérieures. La finition Performance Line + opte pour une présentation qui se veut dynamique. Elle fait la part belle à l’Alcantara, matière qui recouvre donc la planche de bord, les panneaux de porte, et une bonne partie des sièges.

La DS 9 Performance Line +.

La finition RIVOLI + mise plutôt sur le cuir : un sobre cuir noir s’étend donc dans tout l’habitacle. Si vous souhaitez vraiment sortir du lot, l’intérieur OPERA optionnel est un passage obligé. La planche de bord est alors gainée de cuir Nappa jusqu’à sa coiffe, et cette matière recouvre également les sièges et panneaux de porte. Le ciel de toit n’est pas en reste, puisqu’il se pare d’Alcantara. A l’arrière, les (chanceux !) passagers disposeront d’un accoudoir central spécifique (qui comprend notamment les commandes des sièges massants), et d’appuies-tête Lounge.

La DS 9 RIVOLI + avec intérieur Opéra « Rouge Rubis ». Un cuir Nappa noir est également disponible.

Pour être franc avec vous, je ne m’attendais pas un tel soin du détail dans l’habitacle d’une voiture Française. Quelque soit l’endroit où l’oeil (ou le doigt) se porte, les impressions restent flatteuses. Surtout, l’atmosphère qui se dégage de cette DS 9 est vraiment à part (surtout si on opte pour l’intérieur OPERA Rouge Rubis). Pour le coup, et si tenté qu’on adhère à l’esprit baroque qui se dégage de son habitacle, la DS 9 n’a vraiment rien à envier à une berline Allemande équivalente. Bien au contraire.

Le mélomane aura vite fait d’opter pour l’installation Hi-Fi FOCAL Electra optionnelle (1.200 Euro), comptant 14 haut-parleurs. J’avoue avoir été bluffé par cette installation, au son puissant et équilibré, et qui a le bon goût de ne pas verser dans les basses à outrance.

L’amateur de beaux objets sera par ailleurs subjugué par l’un de mes détails préférés de cette DS 9 : sa montre B.R.M R180 qui surplombe la planche de bord, et qui se déploie au démarrage du véhicule.

Un équipement souvent pléthorique, mais parfois dépassé

Conformément à ses ambitions, la DS 9 offre une dotation généreuse. Phares à LED actifs, sièges avants à réglages électriques et chauffants, chargeur sans fil, instrumentation numérique, détecteur d’angles mort, freinage d’urgence automatique et même l’alerte attention du conducteur via une caméra figurent ainsi dans la dotation de série. La finition RIVOLI + pousse le curseur encore un peu plus loin, avec notamment la conduite autonome de niveau 2. En option, il est même possible d’avoir une caméra de vision nocturne à infrarouge (portée de 150 m) !

Malheureusement, quelques équipements sont passés à la trappe : point d’Apple CarPlay sans fil ou d’affichage tête haute, par exemple. Surtout, le système multimédia de 12 pouces (repris du DS 7 Crossback) a déjà pris un coup de vieux, surtout quand on s’attarde sur le système de navigation : graphismes dépassés, manquant de réactivité. Par ailleurs, la résolution de la caméra de recul est indigne du standing de l’auto.

Au volant de la DS 9 : Luxe, calme et volupté

Signe des temps, la DS 9 fait une croix sur le diesel. A la place, elle compte sur un unique 1.6 L turbo essence, associé (ou non) à un renfort électrique. La boite automatique à huit rapports est quant à elle livrée d’office.

Je débute mon essai avec la version E-Tense 225 hybride rechargeable. Le moteur thermique de 180 ch est associé à un moteur électrique, et au total l’auto offre 225 ch et 360 Nm de couple. Malgré sa puissance plutôt confortable, les performances sont correctes, sans plus, avec un 0 à 100 km/h bouclé en 8,3 secondes, et des reprises confortables mais pas foudroyantes. La machinerie électrique et la batterie induisent un poids en hausse : cela se ressent.

Rien à redire en revanche s’agissant des transitions entre les différents modes (thermique et/ou électrique) : elles sont très bien gérées. On se prend rapidement au jeu de la conduite électrique, et on cherche à maximiser les temps d’arrêt du moteur thermique en adoptant une conduite apaisée. Et c’est justement comme ça qu’on apprécie le plus la DS 9. Surtout qu’avec sa batterie de 11,9 kWh, la DS 9 E-Tense 225 ch peut parcourir jusqu’à 48 km en mode tout électrique.

Installé à proximité du sol (c’est un bon point), la DS 9 offre des liaisons au sol de bon niveau. Avec son empattement rallongé par rapport à la Peugeot 508, la grande DS offre une tenue de route forcément moins dynamique que cette dernière, et le coté « tranchant » de la Sochalienne est en bonne partie effacé. Pour autant, elle avale avec un talent certain les longues courbes, avec une stabilité sans faille. Dans les virages resserrés, c’est plus compliqué, avec des mouvements de caisse assez présents, sans doute à cause du poids conséquent de l’auto (1.839 kg à vide). Comme je vous le disais, c’est en conduite apaisée qu’on apprécie le plus la DS 9. Son crédo à elle, c’est le confort, et dans ce domaine, elle n’a pas aucune leçon à recevoir. L’amortissement est très prévenant, surtout que la caméra du système Active Scan décrypte les irrégularités de la route pour adapter les lois d’amortissement. L’insonorisation est également soignée, avec les vitres latérales feuilletées.

Voyageuse de haut rang, la DS 9 s’apprécie également aux places arrières. J’ai pu tester l’expérience au deuxième rang l’espace de quelques kilomètres, et je peux vous assurer qu’elle offre un niveau de confort exceptionnel : espaces aux jambes, confort d’assise, et sièges chauffants, ventilés et même massants (!).

Il est temps de passer derrière le volant de la DS 9 PureTech 225 Performance Line +. La plastique extérieure se veut plus dynamique, et l’intérieur est au diapason. Pesant près de 300 kg de moins que sa soeur E-Tense 225 ch, la PureTech 225 offre des accélérations assez proches de cette dernière, malgré le couple inférieur.

Ma DS 9 Performance Line + prend la pose devant les vestiges du mythique circuit de Reims-Gueux.

Sur le sinueux, on sent que l’auto est un peu plus réactive, et même si la caméra du système Active Scan n’est pas présente de série, le confort reste excellent. En revanche, et si elle fait preuve de douceur en conduite coulée, la boite automatique manque de réactivité en conduite sportive : elle tarde à rétrograder quand on sollicite la pédale de droite, et elle le fait parfois sur un rapport trop bas, laissant alors brailler le moteur. Malgré tout, ce moteur « d’entrée de gamme » offre un bon répondant, et il évite l’écueil des motorisations d’entrée de gamme asmatiques.

Galop d’essai au volant de la DS 9 E-Tense 4×4 360

Je termine mon essai en beauté, puisque DS me tend les clés d’un prototype de DS 9 E-Tense 4X4 360, pour une petite (mais instructive) boucle d’essai. 360 ch, 520 Nm, 0 à 100 km/h en 5,6 secs, 250 km/h en pointe, ou encore 3,2 secs pour le 80 à 120 km/h : les chiffres alignés par cette DS 9 E-Tense 360 sont résolument prometteurs. Outre le 1.6 L thermique de 200 ch, elle aligne deux moteurs électriques, de respectivement 110 et 113 ch. Le premier est implanté sur le train avant, le deuxième sur le train arrière : vous comprenez d’où vient l’appellation 4×4.

« Mon » prototype de DS 9 E-Tense 4×4 360.

DS a également retravaillé les trains roulants : les voies avant et arrière sont élargies, les aides électroniques se veulent plus permissives en mode sport, les freins sont renforcés, et l’auto se dote de jantes 20 pouces spécifiques chaussées de pneus Michel Pilot Sport 4S.

Je l’avoue bien volontiers : cette version m’a bluffé. Plutôt paisible en version 225 ch, la DS 9 verse presque dans la sportivité quand elle dispose de 360 ch. Même s’il reste peu démonstratif, le bloc moto-propulseur fait parler la poudre, et chaque accélération bien appuyée se traduit par un grand sourire sur le visage de votre serviteur. Par ailleurs, et même si ces impressions devront être confirmées au cours d’un essai plus long, la tenue de route m’a paru plus franche, plus tranchante. Je vous avoue que j’ai hâte de découvrir le produit final !

Gamme et tarifs de la DS 9

La gamme DS 9 est assez simple : deux finitions, pas de diesel, pas de boite mécanique, et seulement trois motorisations : PureTech 225 ch 100% thermique, version E-Tense 225 ch hybride rechargeable (une E-Tense 250 ch arrivera un peu plus tard), et E-Tense 4×4 360 ch.

Les tarifs débutent à 47.700 Euros, et grimpent à 69.400 Euros pour la future E-Tense 4×4 360 ch RIVOLI +. Quant au fameux intérieur OPERA (disponible en rouge et en noir), il s’échange contre 4.950 Euros. Quand on regarde les équipements supplémentaires qu’il inclut, on comprend mieux le prix de l’option : le toit ouvrant est de la partie, de même que les sièges avant et arrière chauffants, massants et ventilés, l’accoudoir central arrière haut de gamme, ou encore les appuies-tête Lounge !

Conclusion : La partie n’est pas gagnée, mais…

C’est une évidence : la DS 9 restera assez rare sur les routes. Le segment des grandes berlines est en souffrance depuis des années, et le DS 7 Crossback assure déjà de bons volumes de vente : il est logique que la DS 9 reste assez confidentielle. Il faut donc davantage la concevoir comme un vecteur d’image pour DS, qui dispose avec elle d’un excellent flagship : la voiture est élégante, le soin apporté à son habitacle est réellement épatant (surtout avec l’option intérieur OPERA), et le confort est excellent. Quelques points restent toutefois à parfaire, en commençant par son système multimédia, déjà daté. Et oui, la DS 9 est assemblée en Chine, mais elle n’en reste pas moins une voiture typiquement Française dans sa conception ou son esprit. Et c’est bien l’essentiel non ?