Essais

Renault Zoé R135, toujours la reine ?

Cela fait quatre ans que nous n’avions pas pris le volant de la plus vendue des voitures électriques sur le marché Européen, la Renault Zoé. En quatre ans, de l’eau a coulé sous les ponts, des électrons ont peuplé le paysage automobile, et la concurrence s’est armée de modèles remplis de watts.

À l’approche de ses 10 ans, la petite puce au Losange domine toujours le marché européen de la voiture électrique. Un succès qui ne faiblit pas, incarné par la dernière génération que nous essayons aujourd’hui.

La Zoé, c’est un peu la pionnière. Lancée en 2012, nous étions alors aux prémisses de l’auto électrique et cela était exotique de rouler à coup de watts. Avec ses 210 km d’autonomie en cycle NEDC, soit quasiment la moitié en réel, il n’y avait pas grand chose à attendre de la première Zoé. Et pourtant… la citadine a trouvé son public et s’est améliorée avec le temps.

Début 2017, Mathias nous présentait la version Z.E. 240, avec une toute nouvelle batterie et le double d’autonomie, soit 400 km selon le constructeur, 300 km en conditions réelles. Une nette amélioration qui profita à l’essor du modèle sur le marché européen. En 2020, il s’est vendu près de 100 000 Zoé sur le Vieux Continent, devançant de loin la Tesla Model 3 (85 000 exemplaires) et la menaçante VW ID3 avec ses 56 118 ventes en moins de 6 mois. 

Une place de leader que Renault compte pérenniser avec cette dernière génération : mieux finie, plus puissante et… plus efficiente ! Pari tenu ?

Un look qui ne fait pas de vagues

La plastique générale de la Zoé n’a pas vraiment changé depuis son lancement en 2012. La citadine reprend toujours cette forme tout en rondeur qui fait son charme et qui plait au plus grand nombre. Une silhouette inchangée qui permet de la reconnaitre sans faillir sur la route.

En parallèle du renouvellement de la Clio, et contrairement à Peugeot avec sa e208, Renault a tenu à garder un modèle électrique différenciant. Zoé s’est alors modernisée et arbore une nouvelle signature lumineuse entièrement à LED à l’avant et à l’arrière.

Un nouveau regard qui donne surtout un coup de jeune à un dessin général un poil daté et pas vraiment dynamique, mais qui va bien à la petite puce qui se veut avant tout taillée pour la ville. Dans notre version haut-de-gamme « Exception », elle se voit dotée d’un petite liseré bleu le long de la carrosserie ainsi que de jolies jantes évoquant les autres modèles Initiale Paris du constructeur. Étonnant, d’ailleurs, qu’elle n’ait pas droit à ce label pour coiffer la gamme…

Pas de profonds changements de style… Mais en même temps, pourquoi chercher à changer une recette qui a fait ses preuves et qui fonctionne ?

Des progrès indéniables à bord

Renault s’est concentré sur l’intérieur de la Zoé, et les progrès sont là bien plus marquants. Je dois dire avoir été très agréablement surpris du gap abyssal opéré entre cette toute Zoé phase 2 et les Renault d’il y a encore 3-4 ans. Ayant gardé en tête des habitacles dignes de voitures Playmobil pas vraiment qualitatifs, ma surprise fut à la hauteur des progrès opérés…

La présentation s’est largement modernisée, avec une instrumentation 100 % numérique de très bonne qualité et la disparition d’un maximum de boutons ; mais le plus marquant concerne les matériaux et assemblages, qui sont désormais de très bonne facture pour le segment. Elle n’a ainsi plus à rougir de la comparaison avec une Peugeot e208 par exemple, dont le dessin exigu de la planche de bord et certains assemblages ne sont pas à la hauteur selon moi.

À bord de notre finition haute « Exception », difficile de faire la fine-bouche et d’avoir quelque chose à redire sur les parties visibles. Le cuir nappa blanc et son liseré bleu qui recouvrent les fauteuils et la planche de bord est flatteur, le tout rehaussé d’un placage en bois discret et qualitatif et du plastique moussé. Pas de superflu, une atmosphère simple et surtout une ergonomie excellente qui nous fait nous sentir à l’aise de suite avec la voiture.

Côté équipements, Renault a mis le paquet pour soigner ses occupants : système Hi-Fi Bose, grande dalle tactile réactive et bien conçue, sièges et volants chauffants, chargement sans-fil pour smartphone et 4 ports USB (deux à l’avant, deux à l’arrière). Il ne manque rien à la Zoé, qui se veut être une citadine complète et bien dans son temps.

On voyage sans encombre à quatre, et le coffre de 338 litres n’a rien à envier aux stars du segment des citadines. Ce cocon lumineux et zen, presque scandinave, sied parfaitement au monde de la voiture électrique où le silence est légion.

Quoi de neuf au volant de la Zoé ?

Et quel plaisir, à chaque fois, de retrouver ce monde du silence et de la douceur propre aux véhicules électrifiés.

Les voitures électriques, c’est un peu comme les smartphones. À chaque nouvelle version qui sort, les écrans sont de meilleure qualité, le look est soigné et… le nerf de la guerre : les batteries sont améliorées.

Pour son cru 2020, Renault a ainsi doté la Zoé d’une nouvelle batterie de 52 kWh, contre 41 kWh auparavant, et d’une nouvelle version plus performante : la R135, de 135 chevaux. Elle s’ajoute à la version R110, et propose un gain de performances non-négligeable (2 sec. de mieux sur le 0-100 : 9,5 sec., et 245 Nm de couple disponibles immédiatement).

La batterie, toujours placée dans le plancher, confère à la Zoé cette position de conduite d’autocar (ou de siège-bébé), très droite et haute. Ne pouvant en plus régler la hauteur du siège, il faut un petit temps d’adaptation pour arrêter de pester contre cette position assez peu agréable et non modifiable.

Elle propose de surcroit un amortissement revu sur le papier mais relativement sec à mon goût, et des fauteuils au maintien très limité avec ce joli cuir si glissant. Un cocktail atypique pour une citadine électrique, mais auquel on se fait relativement rapidement et qui plait à sa clientèle. La position de conduite haute et très droite donne une vision panoramique sur la route et la circulation. Pratique et rassurante en ville.

Une efficience bluffante

N’y allons pas par quatre chemins, la Zoé R135 est une reine de l’efficience. Sa nouvelle batterie de 52 kWh et ses différentes optimisations lui confèrent des consommations mesurées et une autonomie surprenante.

Après avoir passé une semaine et emmené la citadine sur tous les types de routes, ma moyenne s’est établie autour des 15,5 kWh / 100 km. Le tout en activant le mode Éco en ville et en roulant une bonne soixante de kilomètres à 110-120 km/h en Normal, sans jamais faire forcément attention à ne pas consommer. Des « éco-runs » en circulation fluide m’ont par ailleurs permis de tenir le 12,5 kWh / 100 km pendant une dizaine de km sans trop de soucis. Un chameau !

La Zoé peut compter sur une roue libre régénératrice de qualité, et un mode B de récupération d’énergie au freinage extrêmement bien calibré. On peut ainsi se prendre au jeu de la conduite à une pédale en anticipant suffisamment les ralentissements et arrêts pour ne pas avoir à freiner. La conduite d’une voiture électrique est quelque chose de ludique, et la Zoé en est un parfait instrument pour des trajets quotidiens. 

Le système multimédia de nouvelle génération est très bien conçu, avec une intégration des bornes de recharge à proximité, du champ d’action possible de la voiture sur la charge actuelle ou encore d’une planification d’itinéraire comprenant les arrêts ravitaillement. Rien de nouveau sur le segment, mais c’est fluide et agréable à utiliser.

Avec de telles consommations, l’ordinateur de bord m’indiquait ainsi que je pouvais parcourir plus de 360 km sur une seule charge, soit un score très proche de l’homologation WLTP à 386 km. Je n’ai pas tenté le diable et vidé la batterie jusqu’au dernier électron, mais après 260 km parcourus et 25 % restants, les 80 km d’autonomie restants me semblait tout à fait en phase.

Voyager en Zoé ? Pas la mieux taillée

La Zoé se sent vraiment à son aise en ville, avec son couple instantané et son rayon de braquage limité, mais elle brille aussi par sa polyvalence. Son comportement sur les petites routes sinueuses est intéressant, avec une caisse très bien maintenue, un centre de gravité très bas et une direction précise. Le confort reste ferme mais le compromis est idéal selon moi.

Avec une autonomie de 350 km sans trop se poser de questions, envisager des week-ends via les départementales et nationales est tout à fait envisageable. À 110 km/h, calé autour de 21 kWh/100 km, l’insonorisation reste excellente et la tenue de cap de la voiture est très bonne. Ses 135 ch lui assurent de bonnes reprises et des performances tout à fait honorables. Toute les aides à la conduite veillent au grain, même s’il manque selon moi le régulateur de vitesse adaptatif dans les bouchons ou sur des routes chargées.

II ne faudra toutefois pas avoir envie de partir très loin avec sa Zoé, ou alors il faudra aimer prendre son temps lors des arrêts-recharge sur autoroute. À 130 km/h, la consommation s’envole alors autour de 32 kWh/100 km et l’autonomie fond logiquement comme neige au soleil. En plein été ou sous 0 degrés, cela risquerait même d’empirer. Ne comptez pas faire plus de 200 km sur autoroute à son volant…

Contre 1000 €, la citadine proposera de charger jusqu’à 50 kW, pas plus. Sachant que la grande majorité des bornes sur autoroute facture désormais à la minute et plus au kW, cela risque de coûter cher d’y emmener une Zoé vu le temps qu’il faudra pour recharger. Dommage qu’elle ne puisse accepter 100 kW…

Vous l’aurez compris, la Zoé est la voiture idéale pour la vie de tous les jours et les escapades extra-urbaines, mais pas vraiment taillée pour les longs trajets autoroutiers où l’hybride reste toujours la solution la plus intéressante. Citadine oblige, elle a de toute façon vocation à être la seconde voiture du foyer que l’on utilisera au quotidien, mais qui partira rarement en vacances. Tant mieux, tant l’électrique et son réseau encore bancal et inégal peut être anxiogène…

La gestion de la recharge d’une voiture électrique sur l’espace public français étant toujours un casse-tête monumental, la typologie parfaite d’utilisation de cette voiture étant d’avoir une solution de charge à domicile ou sur son lieu de travail… Pas besoin de dizaines de badges, d’apps ou d’abonnements, recharger sa voiture comme son smartphone, la nuit à la maison, est encore le choix à privilégier.

Une concurrence qui s’étoffe, mais qui n’inquiète pas la Zoé

Depuis 2012, la Zoé a vu l’offre s’étoffer face à elle, mais elle a su évoluer pour rester dans la course, et toujours dominer le segment des citadines électriques.

Nommons notamment Peugeot et Opel avec leur doublette e208 et Corsa-e, dotées d’une batterie plus petite de 50 kWh, ou encore l’atypique Honda-e et ses 35,5 kWh, et tout récemment la Fiat 500e qui embarque une batterie de 42 kWh.

Aucune ne vient alors inquiéter la Zoé et ses 52 kWh, qui est encore la seule à pouvoir se targuer d’offrir entre 350 km et 400 km d’autonomie sans sourciller sur ce segment destiné avant tout à rester dans le périmètre des grandes agglomérations sans en être pour autant limité. 

Dans sa version la plus puissante R135, la Zoé est proposée à partir de 32 500 € (25 500 € bonus déduit) en finition Life, pour culminer à près de 40 000 € (hors bonus de 7000 €) sur notre version haute bien optionnée. Comptez environ 28 000 € pour un cœur de gamme bien équipé, bonus déduit et avant toute aide supplémentaire ou remise commerciale.

Une addition relativement salée, qu’il faudra pondérer avec les économies de carburant opérées en fonction des habitudes de conduite de chacun. La Zoé fait globalement payer 2000 € plus chère que la e208 ses belles prestations et sa bonne autonomie. Mais avec Tesla qui vient de jeter un pavé dans la marre avec une entrée de gamme de Model 3 à moins de 38 000 €, on une VW ID 3 à moins de 35 000 €, la petite Renault frise dangereusement avec le segment supérieur et l’autonomie qui va avec.

La Zoé jouit de son expérience sur le marché de l’électrique et se bonifie au fil des mises à jour. Elle garde son look bien à elle, améliore grandement ses prestations à bord et se modernise. Sur le plan routier, elle affiche une polyvalence appréciable et surtout une efficience remarquable. Ne lui reste qu’une position de conduite à parfaire, une puissance de charge à porter à 100 kW et une petite baisse des tarifs à envisager, mais ce carton (presque) plein fait d’elle la reine du segment incontestée à ce jour.

Photos : Victor Desmet