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Essai : Audi e-tron 55 quattro : Le véhicule électrique ultime ?

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Virage réussi ?

Dans l’industrie automobile, les choses vont (très) vite. Encore anecdotiques hier, les véhicules électriques (VE pour les intimes) ne cessent aujourd’hui de gagner du terrain. Il faut dire qu’avec la hausse ininterrompue du prix du carburant, une législation de plus en plus hostile aux véhicules thermiques (coucou le malus écologique…), et bien évidemment les préoccupations environnementales grandissantes, de nombreux facteurs tendent à pousser vers ce type de mobilité. Preuve en est, de nombreux constructeurs se sont lancés dans l’aventure, à tel point qu’il est désormais évident qu’un véritable « virage de l’électrique » s’est amorcé. Et le dernier constructeur à lancer sa première voiture 100 % électrique n’est pas des moindres, puisqu’il s’agit d’Audi.

11 ans après le prototype R8 e-tron (le premier à recevoir cette appellation), plusieurs victoires aux 24 Heures du Mans avec la technologie e-tron, plus de 250 prototypes construits (…), le constructeur d’Ingolstadt lance aujourd’hui son premier modèle entièrement électrique, sobrement baptisé… e-tron. Bien évidemment, e-tron se prononce à l’anglaise (petit rappel à destination des gros lourdauds qui ironisent encore sur ce nom, qui évoque pourtant le film de science-fiction des années 80 : Tron). Soit dit en passant, les déclinaisons hybrides rechargeables de la marque, autrefois baptisées e-tron, recevront désormais une appellation différente, à savoir TFSI e, histoire de ne pas s’emmêler les pinceaux.

L’Audi e-tron est le premier des quatre modèles 100% électriques qui seront lancés par la firme d’ici à fin 2020. L’autonomie et la recharge faisant partie des questions centrales pour ce type d’auto, Audi nous a proposé un roadtrip au départ de la région parisienne et devant nous convier jusqu’à l’Ile de Ré -en passant par la superbe région du Perche-, afin de vérifier si sa première proposition sur le marché des VE offre le perfectionnement et la polyvalence que l’on attend d’un de ses modèles. Mon verdict à la fin de cet article !

Un style à la croisée des chemins

Avec ses dimensions conséquentes (4.90 m de long, 1.94 m de large, et 1.63 m de haut), l’Audi e-tron se situe à mi-chemin entre un Q5 et un Q8. Son profil emprunte autant aux codes esthétiques du break qu’à ceux des SUV, à tel point qu’il serait difficile de classer l’auto dans l’une ou l’autre de ces catégories.

En tout cas, la clientèle Audi ne devrait pas être bouleversée, et que les amateurs de sobriété se rassurent : la teinte « Bleu Antigua » et les étriers de frein jaunes de notre modèle d’essai sont l’apanage de l’édition de lancement « Edition One », limitée à 100 exemplaires sur le marché Français.

Parmi les éléments marquants d’un point de vue esthétique, notons la signature lumineuse spécifique à l’avant (composé de quatre barrettes horizontales), le bandeau LED à l’arrière, ou encore le plancher d’une couleur différente du reste de la caisse, afin de souligner la présence de batteries.

Malgré ses imposantes dimensions, l’e-tron offre un excellent Cx de 0,27. Une prouesse rendue possible grâce à plusieurs éléments : calandre mobile, plancher entièrement caréné, et bien sûr les fameux Audi Virtual Mirror.

Votre serviteur en train de mitrailler l’e-tron

Audi Virtual Mirror : le rétroviseur réinventé

Facturée 1.850 Euros, cette innovation Audi proposée en première mondiale sur un véhicule de série permet de remplacer les classiques rétroviseurs par deux caméras grand angle. Ces dernières retranscrivent ce qu’elles captent dans deux écrans OLED installés en haut des contre-portes.

L’écran gauche étant tactile, il est possible d’ajuster la vision offerte par les caméras. Bien évidemment, ce système fonctionne de nuit, et il offre d’ailleurs une meilleure vision qu’un système de miroir classique (testé, et approuvé !).

Nécessitant un petit temps d’adaptation (il faut en effet apprendre à rechercher la rétrovision plus bas que ce à quoi on a été habitué), cette technologie est indéniablement aboutie. Rien n’a été laissé au hasard par les ingénieurs Audi : les lentilles des caméras sont chauffées (pour éviter les effets du gel notamment), et le dessin des bras est spécialement conçu pour évacuer l’eau.

Evidemment, se dispenser d’épais rétroviseurs permet de diminuer les bruits d’air, d’améliorer l’aérodynamique de l’auto, et in fine d’augmenter (un peu) son rayon d’action : + 2 km par rapport à une e-tron dépourvue de cette technologie. Seul inconvénient (hormis le prix évidemment) : la perception de la profondeur et de la distance est rendue plus compliquée, notamment en manoeuvre de stationnement. Au final, et sans mauvais jeu de mot, cette technologie en met pleins les yeux !

Un habitacle flatteur et spacieux

Electrique ou non, une Audi reste une Audi. La marque Allemande l’a bien compris, et ça se vérifie quand on pénètre dans l’habitacle. Proche d’un point de vue visuel de celle d’un Q8, la planche de bord de l’e-tron offre un niveau de présentation et de finition à la hauteur des prétentions de l’auto.

Aucune fausse note n’est à déplorer, que ce soit du point de vue des matériaux utilisés ou des assemblages. Comme sur le Q8, un écran tactile inférieur remplace les commandes de ventilation. Si « l’effet Waouh » de l’énorme tablette tactile centrale d’une Tesla Model X n’est pas présent (relire mon essai de la Tesla Model X), l’Audi se rattrape avec une qualité de finition qui surpasse sans peine celle de l’Américaine.

Les connectivités Apple CarPlay et Android Auto sont bien évidemment de la partie, de même que le désormais connu Audi Virtual Cockpit, qui remplace l’instrumentation classique. A l’instar d’une Tesla, il est possible d’accéder à certaines fonctions de son e-tron à distance, via une application mobile dédiée : climatisation, recharge… Il est même possible de programmer à distance une carte permettant à son détenteur de déverrouiller et même d’utiliser l’auto !

L’e-tron étant dépourvue de boite de vitesse, elle remplace la traditionnelle commande mécanique par un épais repose-main, qui dispose à son extrémité d’une gâchette commandant le sens de la marche, ou le frein de parking
Il fallait y penser : les accueils de ceintures de sécurité sont rétroéclairées !

L’Audi e-tron offre un bel espace intérieur, et notamment aux places arrières. Disposant d’un plancher plat, l’auto peut également compter sur un vaste coffre, capable d’avaler 660 litres d’armes et bagages. Notons qu’un espace de rangement supplémentaire est présent à l’avant, afin de ranger les câbles de recharge.

Sur la route : Du confort, un comportement (plutôt) bluffant, et de solides performances

Après avoir savouré une viennoiserie et un salvateur café à la concession Audi de Vélizy (il pleut en ce samedi matin du mois de mai, et le ciel est désespérément gris…), on s’élance au volant de nos destriers bleus. Les premiers kilomètres sont l’occasion de s’entraîner au freinage régénératif, qui permet de récupérer de la batterie au freinage ou au lever de pied (on peut aussi le commander via une palette au volant), et à l’exception des Virtual Mirror, je prend très vite mes marques.

Remarquablement bien suspendue, l’auto dispose en série d’une suspension à air qui avale littéralement les irrégularités de la route, même sur mon e-tron Edition One d’essai équipée de roues 21 pouces. Une fois lancé sur l’autoroute, j’apprécie la pléthore d’assistances/aides à la conduite (Audi annonce 40 assistances au total !) qui permettent de rendre la conduite semi-autonome à portée de main -si je puis dire-. Pour être tout à fait franc, Audi n’arrive pas encore à égaler le niveau de perfectionnement d’un Autopilot Tesla, qui conserve encore une longueur d’avance en ce domaine. Point intéressant, l’e-tron dispose en série d’un volant capacitif, capable de détecter la présence des mains sur le volant sans qu’il soit nécessaire de le faire bouger (utile lorsque les aides à la conduite -aide au maintien en ligne notamment- sont activées).

Malgré un poids pachydermique (2,5 tonnes !), l’auto offre des performances de tout premier plan (excepté la vitesse maximum, limitée à « seulement » 200 km/h) : 0 à 100 km/h en 5,7 secondes, reprises éclair. Ses deux moteurs électriques (un sur chaque train) font de l’e-tron une quatre roues motrices à part entière (d’où son appellation quattro), et ce même s’ils ne sont pas reliés entre eux par un arbre de transmission. Au total, ils délivrent jusqu’à 408 ch et 664 Nm de couple. Si l’accélération est plus « lissée » (moins brutale si vous préférez) que sur une Model X, l’auto est clairement capable de distancer bien des modèles sportifs à l’accélération.

Mon Audi e-tron prend la pose à l’Ile de Ré

Autre motif de satisfaction : la tenue de route. Si son poids l’éloigne évidemment de la ballerine (on serait plutôt sur un poids lourd type Teddy Riner), l’agilité de l’e-tron est étonnamment satisfaisante, à tel point qu’il est tout à fait possible de prendre du plaisir à son bord sur un itinéraire sinueux, sans risquer le tout droit au premier virage, ni finir sur les genoux de votre passager/passagère. Merci à la suspension à air associée à l’Audi Drive Select, le tout permettant d’offrir un comportement routier à la carte, en jouant sur la rigidité de l’amortissement, et sur la hauteur de caisse.

Et l’autonomie dans tout ça ?

Excellente question mon cher Watson ! Disposant d’une batterie de 95 kWh, l’e-tron offre un rayon d’action de 417 km en cycle WLTP (415 si elle est dépourvue des Virtual Mirror pour ceux qui suivent). Dans les faits, et sur un trajet essentiellement composé de voies rapides (à 110 km/h) entre Vélizy et la région du Perche (lieu de notre première étape), j’ai constaté un rayon d’action d’environ 320 km en conditions d’utilisation réelles. Je m’explique : nous étions deux par auto, et avec mon acolyte Arnaud de quatreroues1volant nous n’avons pas lésiné sur les fonctionnalités de confort : recharge du smartphone, sièges chauffants, ou encore ventilation activés, conditions météos obligent (oui, on se justifie comme on peut !). Comme sur tout VE, il est possible de moduler à la hausse ou à la baisse cette autonomie, qui dépend en grande partie du style de conduite adopté. Sur autoroute par exemple, l’autonomie chute logiquement, pour tourner aux alentours des 250 km.

S’agissant de la recharge, plusieurs solutions sont possibles, de la simple prise domestique à la Wallbox installée à votre domicile, sans oublier la possibilité d’accéder au réseau Ionity, que je détaillerai après. De près de 54 heures pour une charge complète sur prise domestique classique, le temps de recharge passe à environ 14 heures sur une Wallbox 32 A (7,2 kW). Il ne faut pas non plus oublier les partenaires (concessionnaires si vous préférez) Audi, puisque chacune des 145 concessions de la marque en France dispose d’une borne 50 kW. Autre point d’importance : les batteries sont garanties 8 ans, ou 160.000 km. Un signe rassurant, pour ceux qui s’interrogent sur la longévité de ces dernières (à tort le plus souvent).

Le réseau Ionity, et la carte e-tron Charging Service

Formé par un consortium de constructeurs dont Audi fait partie, le réseau Ionity est implanté le long des principaux axes routiers Européens, et chaque « station » est composé de plusieurs bornes rapides 150 kW. Pour recharger une batterie d’Audi e-tron à plat (ou presque), comptez environ 45 minutes sur borne Ionity, comme nous avons pu le constater à la station d’Angers. Ce réseau comptera en 2020 400 stations en Europe, dont 80 en France.

Audi a pensé à faciliter la vie de ses clients, et propose avec cette e-tron la carte « e-tron Charging Service », qui permet d’accéder à 90.000 points de recharge en Europe, dont 15.000 en France, le tout contre un tarif unique (c’est même gratuit la première année).

Gamme et tarifs

La gamme e-tron est composé de quatre finitions : e-tron (à partir de 82.600€), Avus (à partir de 96.900€), Avus extended (à partir de 106.400€), et enfin l’édition de lancement Edition One, facturée 107.140€. A ceci il faut soustraire le bonus écologique de 6.000 Euros.

A titre comparatif, une Tesla Model X débute à 82.200 Euros en version « Autonomie Standard » offrant une autonomie de 375 km en cycle WLTP, la version Performance (0 à 100 km/h en 3,6 secondes !) offrant un rayon d’action de 485 km réclamant quant à elle 100.000 Euros.

Conclusion : Un vrai concentré d’Audi

Non, cette Audi e-tron n’apporte pas de nouveauté marquante dans la planète automobile, à l’exception notable des Audi Virtual Mirror, pas indispensables certes, mais indéniablement bluffants. Ce n’est pas une mauvaise chose pour autant : l’e-tron démontre en effet une vraie réflexion de la part du constructeur Allemand, qui a pris le temps de développer un véhicule électrique sérieux et cohérent, conformément à la philosophie maison. Et c’est là toute la force du modèle : ne pas bouleverser la clientèle maison, qui recherche un produit valorisant et offrant un haut niveau de prestations. Passer d’un Q7 à une e-tron ne nécessitera donc pas de concessions particulières, hormis bien évidemment la question de l’autonomie, qu’il faudra prendre en considération. Ainsi, et même si le rayon d’action de l’auto couvrira 95 % des utilisations (au bas mot…), ce point est peut-être le seul où Audi aurait pu encore pousser un peu plus loin le curseur, histoire de vaincre les dernières réticences. A bon entendeur…