Essais

MINI Countryman John Cooper Works : Usurpation d’Identité ?

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Au commencement, il y avait la MINI. La pionnière se voulait être une voiture de poche, minimaliste et taillée avant tout pour la ville. Plus d’un demi-siècle après, MINI est un constructeur à part entière sous giron BMW, et propose une gamme de plusieurs modèles, allant de la citadine 3 portes au SUV familial. Avec 4,45 m de long et 300 ch sous le capot, le MINI Countryman John Cooper Works a-t-il encore ce pedigree de karting sur la route ? Essai !

Et de trois ! Le Countryman souffle ses quatorze bougies avec une troisième génération. Le SUV de MINI a rencontré au fil de sa carrière un véritable succès, reprenant la bouille de la citadine britannique et l’adaptant pour les familles. Pour ce nouveau cru, le Countryman est désormais proposé avec un choix complet : en essence, diesel, hybride et électrique. Mais parce qu’une MINI est censée avant tout donner la banane au volant, nous avons choisi la version John Cooper Works, forte de 300 chevaux !

La maxi MINI !

4,45 m de long, 1,84 m de large, 1735 kg : la MINI ne l’est définitivement plus qu’au niveau du patronyme. Au fil des générations, le SUV n’a fait que s’agrandir et s’alourdir pour offrir des prestations toujours plus haut-de-gamme. La tendance se poursuit ici, et la MINI en impose !

J’avoue ne pas être fan du côté très cubique de ce nouveau Countryman. Là où jusqu’ici les MINI modernes brillaient par leurs rondeurs, le pare-brise très vertical et le porte-à-faux arrière imposant alourdissent l’ensemble et rendent le bébé plutôt imposant sur la route.

Le traitement John Cooper Works transforme un Countryman un tantinet lourd à regarder en SUV au look sportif et aguicheur. Les jantes 20 pouces rappellent le drapeau à damier, le logo JCW, le capot plus musclé, la teinte bi-ton avec le toit rouge et les quatre pots d’échappements annoncent la couleur ! Les optiques avant et les feux arrière verticaux rappellent les modèles précédents, mais c’est c’est à peu près tout ce qu’il reste de l’héritage du constructeur.

Le Countryman s’adresse à une clientèle désireuse d’un look tendance tout en privilégiant le côté cossu et les aspects pratiques.

À bord du Countryman : le fun en famille

Une fois derrière le volant, le capital fun de MINI est bien là ! La présentation est aussi atypique que sympa à regarder et à vivre. Les commandes de sélecteur de vitesse ou de modes de conduite passent par des gâchettes dignes de l’aviation, le reste des fonctions de la voiture étant désormais rassemblé sur l’immanquable écran tactile rond OLED de 24 pouces placé au cœur de la planche de bord.

Ce dernier est la pièce maîtresse d’une ergonomie soignée et agréable à utiliser, où tout se commande via le tactile et des menus bien conçus. L’interface demande un temps d’adaptation pour être maîtrisée et personnalisée à sa guise, mais elle se relève inédite à naviguer et surtout complète, même si elle souffre encore de lenteurs. MINI a poussé le concept de personnalisation assez loin, puisque les huit modes de conduite (appelés expériences) influent grandement sur la présentation des menus et des compteurs, ainsi que des sons et lumières d’ambiance. Fun !

Côté matériaux, le Countryman JCW souffle le chaud et le froid. La planche de bord et les contreforts de portes sont recouverts d’une maille en tissu que l’on rencontre rarement dans une voiture, et qui participe au côté rafraîchissant de l’expérience à bord. Cela contrebalance avec la sur-présence de plastiques rigides et peu qualitatifs dans une large partie de l’habitacle et d’assemblages moyens. Soulignons quelques détails sympa de finition, comme le volant exclusif logotypé JCW et doté d’un insert en tissu original.

La MINI des familles

Si le Countryman est aussi imposant, c’est aussi et surtout pour répondre à la demande des familles et être la MINI dédiée à ceux qui veulent tout emmener !

Force est de constater que la prise d’embonpoint prend tout son sens : l’habitacle du Countryman JCW est une ode au voyage en famille. 5 personnes peuvent prendre place sans heurt, avec un espace aux places arrières impressionnant. Cette cabine est dotée de larges surfaces vitrées et du toit-ouvrant panoramique qui donnent un sentiment d’espace digne d’un monospace.

Les nombreux rangements à bord, que ça soit à l’avant ou à l’arrière, ainsi que le coffre de 450 L (jusqu’à 1450 L) confirment cette vocation de voiture familiale. La forme cubique permet ainsi de stocker sans soucis des objets volumineux dans la malle, ou d’emporter le compagnon à quatre pattes de la famille.

Côté dotations, notre finition haute John Cooper Works et son pack d’options embarque tout ce qu’il faut : du système Hi-Fi Harman Kardon 100W de qualité à tout l’arsenal d’aides à la conduite qui va bien pour enchaîner les kilomètres avec.

La polyvalence comme maître mot du Countryman

Le Countryman se veut être la voiture à tout-faire, et peut tout à fait s’envisager comme modèle unique du foyer. De par sa taille, correspondant à tous les usages, ou par sa proposition plutôt homogène que ne clive pas.

En ambiance « Core », son mode de conduite par défaut, difficile de se dire que l’on est à bord de la MINI la plus sportive et la plus performante de la gamme tant le Countryman est une bonne pâte. Direction progressive, pédale d’accélérateur prévenante, boite de vitesse douce, sonorité effacée : j’avoue me demander si je ne m’étais pas trompé de motorisation au cours des premiers kilomètres. Une propension à être un SUV politique correct qui jure avec son look d’enfant-terrible.

Rouler en ville ? Aucun soucis, le moteur est souple et il braque bien malgré des grosses jantes de 20 pouces, dont il faudra faire attention car ces dernières sont exposées aux trottoirs. Partir en vacances ? RAS, si ce n’est qu’il demandera des arrêts à la pompe relativement régulièrement. Son gros réservoir de 54 L permet de parcourir entre 350 et 450 km en conduite mixe, avec une moyenne de 9,5 L/100 km, et une impossibilité totale de passer sous la barre des 8,0 L/100 km à rythme de Sénateur.

Ferme, voire un peu trop…

Côté confort ? Forcément, c’est ferme en John Cooper Works ! Même si le Countryman JCW est équipé d’une suspension adaptative, j’avoue ne pas avoir senti de différences parmi les différents modes… Il est sec, voire parfois cassant sur certaines routes dégradées. Mais il offre une bonne tenue de cap sur voie rapide, son terrain de jeu de prédilection. La boite de vitesse DKG à 7 rapports lisse totalement les rapports jusqu’au rythme de croisière, où l’on profite alors d’une insonorisation excellente et d’aides à la conduite efficaces sur lesquelles on peut se reposer.

Le Countryman comme parfait compagnon de vie quotidienne, on n’en doutait à vrai dire pas…

Émotions et sportivité à bord du Countryman, où êtes-vous ?

Le truc, c’est qu’en ayant quatre trompettes dans le pare-chocs, le badge John Cooper Works à peu près partout et un look si démonstratif, je m’attendais à quelque chose d’aussi pétillant derrière le volant ! Que nenni, à mon grand désarroi…

Un héritage marketing

Après la Cooper S, il y a toujours eu la John Cooper Works pour coiffer la gamme. Un hommage à l’ingénieur et pilote britannique à la genèse de la légende de la Mini, faisant de la lilliputienne britannique la reine des rallyes et la renommée qu’on lui connaît aujourd’hui !

Apposer un tel nom sur un SUV familial de plus de 1700 kg aujourd’hui relèverait presque du blasphème si Mini n’entretenait pas l’appellation sous la forme du haut-de-gamme de chacun de ses modèles depuis plusieurs années. BMW en a fait un réel argument de vente chez Mini, comme apposer un badge M sur tous ses modèles, jusqu’au diesel.

Sauf qu’au-delà d’un look et d’un nom, ce Countryman John Cooper Works nous a déçu. Déçu par son plumage bien en-deçà de son ramage. Déçu par des vocalises dignes d’un chanteur en fin de carrière. Déçu par un embonpoint impossible à dissimuler.

Animé par un prometteur 2.0 L bi-turbo de 300 ch, offrant le 0-100 km/h en 5,4 secondes et une vitesse de pointe de 250 km/h, le SUV titillait notre attention ! Dans les faits, nous avons très rapidement réalisé que le Countryman JCW ne serait pas ce karting familial que nous espérions tant. Le couple de 450 Nm dès 2000 tours passe difficilement au sol, malgré une transmission intégrale de série, avec des remontées peu rassurantes dans le volant et un train-avant débordé par ce qu’on lui demande. On se demande alors si le couple se voit répartir entre les quatre roues, ou si le Countryman est une traction pure. Les accélérations du JCW sont touffues, mais il faut conduire avec un œuf sous la pédale de droite pour relancer efficacement. Cela manque d’un différentiel !

Des sensations gommées

MINI était jusque là reconnu pour ses échappement volubiles, qui participaient à apporter du fun à ses autos. Malgré ses quatre imposantes sorties, le Countryman JCW en mode « Go Kart » (Sport) reste malheureusement bien peu bruyant. Je n’attendais pas les pop & bang et retours métalliques des JCW d’il y a quelques années, mais au moins un peu de vocalises rauques comme BMW sait donner à ses modèles. Pour suppléer un échappement bien peu bavard, le constructeur lui a greffé une assistance factice passant par une sonorité créée de toute pièce dans les haut-parleurs intérieurs, avec un vrombissement caricatural et des bruits de turbo peu convaincants. L’ensemble fera sourire les novices, mais décevra celui qui s’attendait à retrouver le bruit pétillant des MINI sportives.

Une MINI à ne pas trop malmener

Enfin, côté châssis, le karting a laissé place au NASCAR. L’agilité caractéristique de MINI que l’on retrouvait encore dans le Countryman a laissé place à des mouvements de caisse prononcés, dont l’embonpoint et les dimensions ne peuvent ici être dissimulés. L’amortissement piloté peine à gommer la prise de roulis. Le SUV a une fâcheuse tendance au sous-virage, et l’inscription en courbe est fainéante. Le grip est bon et il n’est en rien piégeur, mais il ne faut pas imaginer prendre du plaisir dans les enchaînements sinueux à son volant. Il vous fera transpirer, et le châssis sera aussi perdu que la boite de vitesse automatique qui cherchera à rester dans les tours tel un atmo’ alors que le couple ne se trouve qu’au tout début du compte-tours. Ni la mécanique, ni le tempérament de la voiture ne laissent présager qu’il s’agit ici d’une version John Cooper Works.

Allez, parce que le tableau n’est pas que mauvais, notons un excellent freinage, au mordant et à l’endurance rassurants, et une position de conduite convaincante via des fauteuils au bon maintien et à un volant agréable en mains.

Une version de figuration ?

Une belle gueule et c’est tout ? Pas vraiment… Le Countryman JCW est avant tout une vitrine pour le constructeur, qui se targue de proposer encore un modèle thermique avec 300 ch. Pas d’hybridation, pas d’électricité, il s’adresse à ceux qui désirent un SUV familial avec un look cossu et tendance, un habitacle aussi technologique qu’accueillant et fun et une polyvalence certaine sans forcément vouloir abattre des temps sur des spéciales.

Dans la vie réelle, en même temps, personne ne va vraiment faire des road-trips ou des après-midi de circuit en MINI Countryman… Partant de ce postulat, notre gros bébé Britannique ascendant Allemand incarne parfaitement ce SUV tendance et sexy, qui sait rouler vite. Il fait payer cher ses prestations (notre version JCW optionnée dépassait les 60 000 €). Un GLA AMG ou un X1 35i seront plus sportifs, mais ils n’auront pas le côté attachant et décalé d’une MINI, même avec 1750 kg sur la balance. Une MINI de ce poids et à ce tarif pour emmener la famille ? John Cooper ne devait pas y avoir pensé ! La loi de l’évolution, nous dira-t-on…

Photos : Victor Desmet