Essais

On a testé la Renault Eolab : un vent de Révolution !


Révolutionnaire!

Ce n’est pas tous les jours qu’un constructeur nous laisse le volant d’un prototype. Coût prohibitif (en l’occurrence plusieurs millions d’Euros…), modèle unique… Les raisons ne manquent pas pour expliquer pourquoi ce genre d’initiative reste anecdotique. Alors quand Renault nous a contacté pour essayer Eolab, l’occasion était bien trop belle pour que nous passions à côté.

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Ce prototype unique ne constitue pas moins que la proposition du constructeur pour réduire sensiblement la consommation de carburant. La baisse des émissions de CO2 n’est pas un vain mot pour la marque, puisqu’elle se place déjà sur la plus haute marche du podium en terme d’émissions de CO2, avec une moyenne de 115 g/km pour l’ensemble de sa gamme en 2013. Surtout, Renault fait partie des constructeurs ayant le plus fait la promotion du véhicule électrique, en proposant à la vente une large gamme de véhicules « Z.E » (Zero Émission). La nouveauté d’Eolab est justement qu’elle n’opte pas exclusivement pour le mode de propulsion électrique, mais pour une solution hybride rechargeable, comme nous le verrons après. Si Eolab ne sera pas commercialisée en l’état, c’est bien plus qu’un simple exercice de style ou qu’un faire-valoir. Pour Laurent Taupin, chef de projet Eolab, ce modèle constitue en effet « bien plus qu’un concept-car », il « préfigure les Renault de demain ». Il est le fruit d’une coopération entre une multitude d’entreprises, qui ont travaillé 3 ans sur ce projet, avec un objectif commun : réduire drastiquement la consommation. Eolab réunit à elle seule plus d’une centaine d’innovations, la plupart ayant fait l’objet d’un dépôt de brevet.

La genèse

Ce concept ne constitue pas à proprement parler un coup d’essai pour Renault, qui avait dévoilé dans les années 1980 un prototype baptisé Vesta II. Ce dernier constituait la réponse de la marque à la commande passée par le Ministre de l’Industrie de l’époque, qui visait à concevoir un véhicule capable de passer sous la barre des 3 L /100 km. Une commande honorée et même largement dépassée, puisque la Vesta passa sous la barre des 2 L/100 km (1,94 L/100 km pour être précis), sur un trajet autoroutier entre Bordeaux et Paris, à 100,9 km/h de moyenne. Une sacrée prouesse pour l’époque, obtenue grâce à un poids plume (473 kg à vide), et à un excellent coefficient de pénétration dans l’air (Cx de 0,186).

Rançon de cette prouesse, la Vesta ne s’illustrait pas par sa plastique, et c’est un euphémisme…

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Le prototype Renault Vesta II, qui a sacrifié le style sur l’autel de l’efficience maximale

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La grande nouveauté d’Eolab, c’est qu’elle cherche à concilier efficience et attractivité. Une équation pas si facile que cela à obtenir, surtout avec de très fortes contraintes du point de vue aérodynamique.

Les objectifs d’Eolab

Trois grands objectifs ont guidé ses concepteurs : 1. La séduction. 2. Les performances. 3. Le coût.

1. La séduction 

Si Eolab ne plaira peut-être pas à tout le monde, il faut tout de même admettre qu’elle se dote de nombreux attributs stylistiques qui tranchent avec l’austérité qu’on retrouve d’habitude sur ce genre de véhicule : arêtes vives, profil asymétrique sculpté et très élancé, optiques effilées… Nous, on adhère!

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 La face avant est presque sportive, avec ses larges entrées d’air latérales et ses optiques effilées 

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 Les nervures du capot se prolongent jusqu’aux arches de toit  

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 Comme le Hyundai Veloster, l’Eolab présente un profil asymétrique, avec sa 2ème porte latérale du côté droit. La ceinture de caisse remontre très haut

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Les optiques arrière ont fait l’objet d’un soin particulier. L’effet est particulièrement réussi, avec un guide lumineux qui court sur toute la largeur.  La face arrière est surmontée par un large becquet, aussi esthétique qu’aérodynamique.

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 La vitre de custode est prolongée esthétiquement jusqu’à la lunette arrière. Superbe! 

L’intérieur se veut aussi futuriste que l’extérieur. Il a recours à ce que Renault appelle l’IHM : l’Interface Homme Machine. Cette interface se compose de deux écrans superposés au-dessus du volant, qui assurent les fonctions essentielles liées à la conduite (vitesse, navigation, charge de batterie…), et d’une grande tablette tactile 11″, qui en plus d’assurer la rétrovision centrale informe le conducteur sur sa conduite et sa consommation, par l’intermédiaire d’un diagramme à 5 branches, qui forme l’équation énergétique de la voiture.

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Le diagramme à 5 branches

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L’intérieur de l’Eolab, très clair et épuré, se montre agréable à vivre

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Au centre de l’accoudoir trône un « joystick » qui permet de commander la boîte de vitesse 

2. Les performances 

Eolab se veut performante à double titre : du point de vue des performances pures, « chronométrées », mais également du point de vue de la consommation. Cet objectif a nécessité un travail en plusieurs étapes.

Il a d’abord fallu baisser drastiquement le poids de l’auto, afin d’atteindre le plus grand degré d’efficience. La recherche du kilo superflu a guidé les concepteurs de l’Eolab du début jusqu’à la fin du projet. Cette chasse au poids a permis d’utiliser une motorisation hybride plus petite, la solution classique d’hybridation avec grosse batterie et coût important ayant été mise de côté dès le début. Cette baisse de poids a permis l’utilisation de composants plus petits (freins, direction…), par le jeu d’un « cercle vertueux de l’allègement ».

Cet allégement est également passé par l’utilisation de nombreux matériaux : acier pour l’habitacle, aluminium pour le berceau avant, la traverse arrière ainsi que les zones de torsion, magnésium pour le pavillon, ou encore polymère pour le plancher et les ouvrants. Le dossier de la banquette arrière fait même partie intégrante de la structure de la caisse (elle est en contrepartie fixe)!

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Le toit, en magnésium, ne pèse que 4 kg! 

Cet allégement est également passé par les surfaces vitrées, avec un pare-brise plus fin de 1,5 mm par rapport à un pare-brise classique. L’adoption d’un capot fixe, seulement démontable en SAV, a permis à elle seule d’économiser 2,5 kg (une trappe est prévue pour accéder aux niveaux). L’échappement est de type « ligne courte », puisque la canule est située sous le plancher, juste derrière les passagers avant.

Au total près de 130 kg ont été économisés sur la carrosserie, 160 sur le châssis et la chaîne de traction, et 110 sur les différents équipements! Le poids de l’Eolab s’établit à 955 kg, contre 1.205 kg pour une Clio IV GT TCe 120.

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La structure complexe de l’Eolab

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Un soin particulier a été porté à l’aérodynamisme. La forme de la voiture a fait l’objet de toutes les attentions, avec un pavillon beaucoup plus bas qu’une Clio classique, ce qui permet d’offrir une surface frontale réduite (et donc moins de frottements). Afin de ne pas réduire l’habitabilité, et notamment la garde au toit, les passagers ont été descendus dans la voiture, et avancés, ce qui permet à l’Eolab d’offrir la même habitabilité qu’une Clio IV, avec des dimensions comparables : 4.070 mm de longueur, pour 1.726 mm de largeur.

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L’Eolab offre une habitabilité comparable à celle d’une Clio IV

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Des rideaux d’air disposés dans le bouclier avant permettent de diriger le flux d’air vers les roues avant

Le positionnement du moteur plus près du sol a permis d’abaisser le capot. Les voies arrière sont par ailleurs resserrées de 100 mm par rapport aux voies avant.

Eolab présente également de nombreux éléments aérodynamiques actifs, en commençant par l’assiette pilotée. Celle-ci permet à la voiture d’être en position haute lorsqu’elle est garée, afin de faciliter l’accès à bord. Dès que la voiture commence à rouler, elle s’abaisse de 25 mm, de 5 jusqu’à 70km/h. Arrivée à 70km/h, elle s’abaisse de nouveau de 25 mm, afin de diminuer la quantité d’air qui passe sous la voiture. A cette même vitesse le spoiler avant descend automatiquement.

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 Le bouclier arrière est équipé de flaps à déploiement automatique, qui s’ouvrent de 6 cm dès 70km/h, afin d’éviter la création de tourbillons d’air qui ralentissent la voiture

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Les rétroviseurs sont remplacés par des caméras, associées à des écrans présents sur les portières 

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 La rétrovision arrière est assurée par une caméra dissimilée au centre du losange.  Les images sont diffusées sur la tablette centrale

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Les enjoliveurs actifs, qui ne s’ouvrent que si les freins sont chauds, et qui restent « plein » le reste du temps, permettent également de lutter contre les frottements aérodynamiques. Michelin a développé des pneus spéciaux pour l’Eolab, avec un profil très étroit (145/70 R17), afin de diminuer la traînée.

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Un détecteur de température implanté au sein des enjoliveurs permet de commander leur ouverture 

Au final, l’Eolab présente un SCx de 0,470 m², soit une amélioration d’environ 30% par rapport à une Clio IV.

Les performances « pures » n’ont pas été oubliées, avec des chiffres similaires à ceux d’une Clio GT TCe 120, puisque l’Eolab passe de 0 à 100km/h en 9 secondes!

Cette performance est à mettre au compte de la chaîne de traction inédite, de type hybride rechargeable, baptisée « Z.E Hybrid », et qui est exclusive à la marque au losange. Elle mêle un 3 cylindres 1 L de 75 ch et 95 Nm, à une batterie Li-ion d’une puissance  de 6,7 kWh. Le moteur électrique, à aimants permanents, est capable à lui seul de délivrer un pic de puissance instantanée de 50 kW, et de fournir un couple de 200 Nm. Le tout est associé à une transmission innovante sans embrayage, basée sur une boîte de vitesses à trois rapports.

Deux modes de fonctionnement du système hybride sont disponibles :

  • Un mode semaine : ce mode privilégie au maximum la traction électrique sur les trajets quotidiens, du type domicile-travail. L’autonomie est suffisante pour parcourir 60 km en mode 100% électrique, et le décollage de la voiture se fait toujours avec le moteur électrique. Le premier rapport permet de rouler en électrique jusqu’à 60/70 km/h. Au-delà, le système passe automatiquement sur le second rapport – toujours en électrique – jusqu’à 120 km/h. Au-delà, le démarrage et le couplage au moteur thermique est automatique avec le basculement en mode hybride avec l’aide du 3ème rapport.
  • Un mode week-end : il mixe les deux modes de propulsion, pour offrir davantage d’autonomie, et couvrir des distances plus longues. Le décollage se fait toujours avec le moteur électrique, mais le moteur thermique se met cette fois en route à basse vitesse. A partir de là, les deux propulsions se marient. Avec ce mode, la batterie se recharge dans les phases de décélération et de freinage. L’enchaînement des différents rapports hybrides permet d’aller jusqu’à la vitesse maximale du véhicule

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En mode charge rapide, il faut moins d’une demi-heure pour recharger la batterie de l’Eolab 

Le résultat de tous ces efforts? Une consommation de seulement 1 L/100 km sur cycle mixte NEDC, soit 22 g d’émissions de CO2/km! Une prouesse qui mérite quelques explications. Cette consommation a été obtenue sur un cycle de 100 km. La voiture est partie avec une batterie chargée à 100%, et a parcouru les 66 premiers kilomètres en mode tout électrique, avant que la batterie ne soit complètement déchargée. Puis le moteur thermique est entré en fonctionnement pour parcourir le reste de la distance, ce qui nous ramène à cette consommation incroyablement basse.

 3. Le coût 

En plus d’améliorer la consommation, l’allègement réalisé sur Eolab permet de contenir les coûts, grâce à l’utilisation d’éléments mécaniques plus petits (direction, freins, moteur thermique…). On retrouve ici la notion de cercle vertueux de l’allègement, qui influe directement et de façon positive sur le prix de vente.

Comme le résume Laurent Taupin, « Les économies réalisées par le redimensionnement des organes mécaniques nous ont permis de financer les matériaux et technologies plus chers, tout en restant à iso-coût global ». Renault revendique donc pour l’Eolab un « coût de possession d’un véhicule de type Clio ».

Une sacrée prouesse vu le prix des autres véhicules hybride rechargeable. À titre d’exemple, une Prius rechargeable, certes plus grande et plus puissante, s’affiche à 37.300 € dans sa version de base (hors bonus écologique).

L’essai routier

C’est sur le CERAM (Centre d’Essais et de Recherche Automobile de Mortefontaine) que nous avons pu prendre en mains l’Eolab, pour une session de conduite réalisée sous un ciel peu clément.

Après avoir ajusté notre position de conduite, nous plaçons le petit sélecteur de vitesse sur la position « D », et nous relâchons le pied du frein. La voiture décolle alors dans un silence de cathédrale, comme toute électrique qui se respecte. Ce n’est qu’à l’extérieur qu’on remarque un petit sifflement strident, caractéristique des véhicules à propulsion électrique, et qui colle parfaitement au look futuriste de cette Eolab.

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Les premiers mètres sont les plus déconcertants. Et pour cause : l’Eolab est tout sauf un prototype. C’est une « vraie » voiture, et à ce sujet l’attitude de Renault est très révélatrice, puisque nous avons pu l’essayer en toute liberté, malgré la présence d’un metteur au point à nos côtés. A aucun moment ce dernier n’est intervenu pour tempérer nos ardeurs, et nous avons ainsi pu hausser progressivement le rythme.

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On s’aperçoit très vite que l’auto est vive, puisqu’elle atteint rapidement son rythme de croisière, et ne rechigne pas à augmenter encore l’allure. L’un des membres de l’équipe de développement présent sur place nous a d’ailleurs confirmé l’excellente santé de l’Eolab, qui atteint sans sourciller les 180 km/h en pointe!

Un coup d’accélérateur un peu plus poussé permet de démarrer le moteur thermique, qui émet alors une sonorité assez suggestive, voire sportive, moteur 3 cylindres oblige. Ce qui frappe surtout, c’est à quel point la transition entre le moteur électrique et le thermique s’effectue de façon douce et cohérente, et c’est un propriétaire de Toyota Prius qui vous parle…

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Ceci est d’autant plus étonnant que la voiture n’a pour l’instant bénéficié que de deux mois de mise au point, selon les aveux des techniciens présents sur place.

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 L’Eolab n’a pas à rougir de ses prestations routières, bien au contraire!

Autre point qui étonne : la qualité des liaisons au sol. Sans avoir forcément brusqué l’auto, qui vaut il faut le rappeler plusieurs millions d’Euros, on s’aperçoit très vite que le châssis a bénéficié d’une très bonne mise au point, puisque la voiture prend peu de roulis, et se montre dynamique dans les changements de direction. Notre accompagnateur nous a d’ailleurs indiqué que ses prestations routières sont similaires à celle d’une Clio IV GT, ce qui est en parfaite cohérence avec ce que nous pu constater. Le seul bémol à apporter vient de la transition entre le 2ème et le 3ème rapport, qui s’effectue de manière un peu lente et saccadée, comme si la voiture hésitait. Un point qu’on peut légitimement mettre sur le compte de la très courte période de mise au point dont a bénéficié la voiture, et qui aurait sans aucun doute été corrigé avec un peu plus de temps.

Hormis ce détail, l’Eolab fait preuve d’une vraie aisance, et c’est avec un réel plaisir que nous enchaînons les virages de la piste d’essai de Mortefontaine, d’autant plus que la direction se montre légère et réactive. Une fois encore on est loin de l’idée qu’on peut se faire d’un prototype, qu’on imagine dépasser avec difficulté les 25 km/h…

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 L’Eolab se montre très plaisante à mener, avec un châssis dynamique, et une direction communicative  

Il est malheureusement déjà temps d’en rendre le volant, et c’est avec un enthousiasme non dissimulé que nous concluons cet essai, pour ce qui constitue à n’en pas douter une voiture qui marquera un tournant pour Renault.

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 Il est déjà temps de rendre l’Eolab…

Conclusion : vivement demain!

L’Eolab est une vraie révélation. Dès les premiers mètres effectués à son volant, on comprend qu’elle constitue bien plus qu’un prototype, tant l’ensemble paraît cohérent, presque commercialisable en l’état. Elle ne sera malheureusement jamais produite en l’état. Elle constitue en revanche un vrai laboratoire pour les futures Renault, qui auront toutes un peu d’Eolab en elles. La marque se fixe à ce sujet l’objectif de transposer toutes les innovations qu’elle porte à l’horizon 2020. Une belle promesse pour l’avenir…