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Essai : Audi S5 Sportback V6 TDI : Hérésie, ou vrai bon choix ?


Un pari osé pour Audi

Si vous êtes un amateur éclairé de la chose automobile, vous n’êtes sans doute pas passé autour d’une récente « polémique » : celle qui tourne autour d’Audi, et du choix de la marque Allemande de passer au diesel pour un certain nombre de ses modèles S (modèles à vocation sportive, comme vous pouvez vous en douter). En l’occurence, les S4, S5, SQ5, S6 (S6 dont vous pouvez relire l’essai ici) et S7 accueillent depuis quelques mois un moteur V6 3.0 TDI sous leur capot. Citons également le SUV SQ7, qui reçoit toutefois un bloc TDI différent, puisqu’il s’agit d’un V8 Bi-TDI de 435 ch.

Après avoir goûté aux charmes de la très élégante berline S6 il y a quelques mois, je suis parti à la découverte de la plantureuse S5, dans sa version Sportback. Une S5 d’ailleurs fraîchement restylée, comme le reste de la gamme A5. Le passage au gasoil dénature-t-il ce superbe coupé 5 portes ? Quelle diablerie a bien pu pousser Audi à opter pour un V6 TDI en lieu et place du V6 TFSI ? Autant de question auxquelles je compte bien répondre !

Présentation : Diva en survêt’

Lancée en 2016, la deuxième génération d’A5 a reçu il y a quelques mois un restylage de mi-carrière. Les modifications apportées par Audi ne sautent pas forcément aux yeux (grille de calandre plus plate et plus large, lame inférieure en partie basse du bouclier avant, plus grandes admissions d’air…), mais à vrai dire, on s’en fiche un peu.

Il faut dire que l’auto aimante littéralement les regards, et que quelque soit l’angle adopté, rien ne jure. Et si vous voulez mon avis, la carrosserie Sportback sublime encore le dessin de cette S5, avec ses flancs marqués, ses portières dépourvues d’encadrement, et sa chute de pavillon très… sensuelle. Malgré une longueur assez conséquente (4,67 m), l’auto parait dynamique et râblée.

Déclinaison S5 oblige, l’auto reçoit des éléments stylistiques exclusifs, qui appuient sa vocation sportive : pare-chocs avant spécifique avec calandre en nid d’abeille (avec liséré noir titane mat) et larges prises d’air, rétroviseurs extérieurs en aluminium argenté mat, et à l’arrière un diffuseur orné de deux doubles sorties d’échappement chromées (factices côté droit toutefois). Un discret becquet complète le tout.

Et comment ne pas parler de la teinte « Bleu Turbo » de notre modèle d’essai ? A défaut de se montrer discrète, cette dernière donne une présence folle à l’auto, et assoie sa vocation sportive.

Une expérience intérieure exceptionnelle

Un titre un rien pompeux je vous le concède, mais tout à fait justifié. En effet, et de tous les intérieurs qu’il m’ait été donné de voir, je dois bien dire que celui de cette Audi S5 sort facilement du lot.

Pas par le dessin de la planche de bord non, puisque ce dernier est somme toute (très) classique. Non, c’est la qualité de finition qui sort de l’ordinaire. C’est bien simple : quelque soit l’endroit où l’oeil (ou la main) se pose, tout est flatteur : assemblages, matériaux utilisés… Mention spéciale aux placages en carbone Sergé (en option), très réussis, alors que les accastillages similaires font généralement cheap.

Là encore, cette version S reçoit des éléments spécifiques : sièges sport, pièces en aluminium brossé mat, panneaux de porte recouverts d’Alcantara, et volant multifonctions plus en cuir à 3 branches avec emblème S et surpiqûres apparentes. La sellerie retenue sur notre version d’essai rehausse encore l’expérience, puisqu’elle était recouverte de cuir Nappa.

Depuis le restylage, l’Audi S5 (comme toute la gamme A5) reçoit un nouveau système multimédia « MMI touch », avec un écran tactile de 10,1 pouces offrant un retour haptique (comprenez : il offre la même sensation que des vraies touches), qui remplace le bouton rotatif des modèles précédents. Evidemment, le fameux Audi Virtual Cockpit (de 12,3 pouces) est de la partie, et l’expérience qu’il offre est toujours aussi soignée.

Autre point positif : l’espace disponible aux places arrières. Même un gaillard de 1,90 m arrive à y loger, et sans toucher le plafond s’il vous plait ! Rajoutez un coffre logeable (480 litres) et accessible via un large hayon (électrique évidemment), et vous obtenez une auto parfaitement dimensionnée pour les voyages en famille.

Une dernière chose : la position de conduite est à mon sens parfaite. Proche du sol, jambes semi-allongées : elle a peut-être 5 portes, mais elle reste résolument coupé dans l’âme cette S5 Sportback !

Sur la route : Une belle incarnation du grand tourisme

Avant de livrer mes impressions de conduite, il est nécessaire de revenir sur la source de la discorde : le moteur de cette S5 Sportback. Comme je l’évoquais dans l’introduction, il s’agit d’un 3.0 TDI. Mais ne croyez pas qu’il s’agit d’un « bête » diesel. Oh non.

Zoom sur le V6 S TDI

Par rapport à l’immense majorité des blocs diesel du marché, ce 3.0 TDI dispose d’une architecture plus noble, puisqu’il s’agit d’un V6. Surtout, et fort de son expérience victorieuse en compétition (et plus précisément en Endurance), Audi a largement revu son moteur, rebaptisé pour l’occasion V6 S TDI. Concrètement, la S5 dispose d’un système hybride léger (MHEV), avec un alterno-démarreur qui récupère de l’énergie pendant la décélération, et qui la stocke dans une batterie au lithium-ion.

Surtout, le V6 S TDI de notre S5 dispose d’un compresseur électrique disposé juste à côté du moteur, et qui est intégré dans le système électrique principal de 48 volts (contre 12 volts pour une auto classique). Capable de tourner à 70.000 tr/min, ce compresseur permet d’anéantir le temps de réponse à l’accélération (250 millisecondes), en venant épauler le turbocompresseur. Oubliez le fameux turbo-lag qui vous laisse parfois sans puissance pendant quelques longues secondes, le compresseur électrique vient gaver le moteur d’air dans les situations où les gaz d’échappement sont justement trop faibles pour l’alimenter. Au final, cette S5 Sportback offre 347 ch, et surtout 700 Nm de couple (!), et évidemment, cette électrification permet de réduire la consommation de carburant (Audi annonce ainsi 0,4 litre aux 100 kilomètres gagnés).

Impressions routières

Tout cette débauche technologique est impressionnante me direz vous, mais ça donne quoi dans les faits ? Et bien, c’est plutôt flatteur. Déjà, les performances sont impressionnantes. Le V6 S TDI fait ici bien plus que la figuration : il catapulte littéralement l’auto, avec un 0 à 100 km/h en 4,9 secondes, et 250 km/h en vitesse de pointe. Autant vous dire que cette S5 Sportback laisse sur le carreau à peu-près tout ce qui roule, et pas seulement sur le 0 à 100 : les reprises sont foudroyantes. Par ailleurs, je rejoins totalement l’analyse d’Audi sur les bienfaits du compresseur électrique : le temps de réaction est imperceptible, et toute impulsion sur la pédale de droite est immédiatement répercutée par le moteur. Si le turbo-lag est absent et que le moteur se montre plein à tous les régimes, il faudra en revanche accepter de ne pouvoir grimper que jusqu’à 5.000 tr/min, contre au moins 1.500 tr/min de plus pour un moteur essence équivalent. Il faut bien qu’il y ait quelques inconvénients tout de même !

La boîte Tiptronic à 8 rapports est à la hauteur du reste : elle associe douceur dans les passages de rapports et excellente réactivité (au kickdown, mais aussi lorsqu’on bascule en mode manuel via les palettes au volant). Un vrai bonheur.

Reste un dernier point, et pas des moindres : la sonorité. Sur ce point, l’auto souffle le chaud et le froid. Le chaud tout d’abord, puisqu’à défaut de se montrer raffinée, la sonorité rauque (amplifiée ou au contraire étouffée selon le mode de conduite retenu) du V6 S TDI va plutôt bien avec le tempérament de l’auto. Le froid ensuite, puisqu’à bas régimes une sorte de petit cliquetis se fait entendre (surtout si comme moi vous poussez la curiosité jusqu’à soulever le capot). Surtout, les détonations et autres pétarades qu’on retrouve de plus en plus sur les blocs essence sportifs sont ici aux abonnés absents. Snif.

On en vient à aborder l’un des plus gros point forts de cette S5 Sportback : sa tenue de route. C’est bien simple : l’auto semble comme soudée au sol. Rarement j’ai pu expérimenter une telle sensation de facilité et de sécurité au volant. Même sur ma petite route de prédilection faite de virages serrés et de grosses bosses -qui mettent généralement à mal l’amortissement-, l’auto est restée impériale et agile. Un vrai tour de force, surtout qu’elle accuse tout de même 1.870 kg en ordre de marche. Contrairement aux idées reçues, et si même l’amortissement est typé ferme, l’auto reste confortable, même en mode Dynamic (mode de conduite le plus sportif, surtout que ma S5 était dotée de l’amortissement piloté optionnel). On sent d’ailleurs un gros travail effectué par Audi sur ce point, puisque même les petites routes dégradées de l’arrière-pays Français n’auront pas réussi à mettre à mal l’amortissement de l’auto. Du grand art.

La direction obéit au doigt et à l’oeil (mon modèle d’essai disposait de la direction dynamique optionnelle), et le système quattro avec différentiel Sport (sur l’essieu arrière) offre une motricité de tous les instants, et c’est encore plus impressionnant sur chaussée grasse/mouillée (même en forçant beaucoup le trait, du genre roues braquées et pied droit enfoncé jusqu’à la moquette).

En revanche, ne vous attendez pas à faire des figures acrobatiques : le train arrière est riveté à la route, point barre. Du pur Audi en somme. Et c’est là qu’intervient ma principale remarque au sujet de cette Audi S5 Sportback : il ne faut pas la concevoir comme une véritable sportive, mais plutôt comme une jolie interprétation de la philosophie grand tourisme. Ne vous méprenez pas : l’auto offre une efficacité de tous les instants, et des performances de très haut niveau. Mais on sent bien qu’elle a été pensée pour les voyages au long cours, et à vive allure.

C’est en effet dans ces conditions qu’elle offre le meilleur d’elle-même : le V6 S TDI ronronne à bas régimes et reprend instantanément dès qu’il le faut, le confort offert est tout bonnement exceptionnel (mention spéciale aux sièges massants au maintien parfait), et le système Audio Bang & Olufsen avec son 3D optionnel chouchoute les oreilles des occupants.

Et la consommation dans tout ça ?

On en vient au dernier point d’importance (et même essentiel s’agissant d’une auto carburant au gasoil) : la consommation. Audi annonce à ce chapitre une moyenne de 7,0 L / 100 km (en cycle WLTP, bien plus réaliste que le cycle NEDC), et dans les faits j’ai constaté une moyenne d’environ 10,0 L sur les près de 900 km de notre essai, avec une conduite tout sauf tendre je dois bien le confesser. A titre indicatif, sur le chemin pour rendre l’auto (200 km, dont une grosse partie sur autoroute à bonne allure), je suis descendu à 7,9 L. Très raisonnable pour une auto de 347 ch ! Quoiqu’on en dise, ce genre de consommation semble irréalisable avec un bloc TFSI équivalent, et on comprend mieux la démarche d’Audi d’avoir opté pour ce V6 S TDI, qui associe performances de haute volée et consommation relativement raisonnable.

Tarif de l’Audi S5 Sportback

La S5 Sportback est affichée à 80.200 Euros, avec un équipement déjà bien fourni : sièges avant électriques, hayon électrique, Audi Phone Box, système MMI Navigation plus, Audi Virtual Cockpit Plus, Audi drive select, projecteurs Matrix LED…

Evidemment, les options font vite grimper la facture, et c’est ainsi que mon modèle d’essai particulièrement bien pourvu culminait à… 101.090 Euros. Au sujet des options, permettez moi un petit conseil : cochez la case « projecteurs HD Matrix LED avec Audi Laser Light » (1.050 Euros). La conduite de nuit s’en trouve métamorphosée, je peux vous le garantir.

Points positifs :

+Ligne à tomber par terre

+Présentation intérieure, qualité de finition

+Aspects pratiques : places arrières logeables, grand coffre

+Performances du V6 S TDI, consommation contenue

+Tenue de route de haute volée, confort préservé

Points négatifs :

-Sonorité moins flatteuse qu’un TFSI équivalent

-Très efficace, mais pas expansive

-Tarif une nouvelle fois élitiste

Conclusion : Et pourquoi pas !

Au début de cet article, je m’interrogeais sur les motivations qui ont pu pousser Audi à implanter un TDI sous le capot de cette S5. Si je ne suis pas dans le secret des dieux, je pense qu’elle tient à une raison essentielle : la consommation, et par extension les émissions de CO2. A l’heure où le malus écologique frappe très durement les sportives (surtout depuis l’entrée en vigueur du nouveau cycle WLTP), proposer une S5 carburant au diesel (aux émissions de CO2 forcément plus contenues qu’une S5 TFSI équivalente) semble faire sens. Surtout que les performances restent très intéressantes (merci l’hybridation légère), et que la consommation est forcément plus attractive. Reste à composer avec le revers de la médaille : la sonorité moins flatteuse, et la plus faible plage d’utilisation du moteur.

L’articulation dans la gamme fait aussi sens : les plus sportifs resteront naturellement sur l’option RS5 (450 ch, 600 Nm, 0 à 100 en 3,9 s, et 97.570 Euros), alors que la S5 s’adressera prioritairement à ceux qui recherchent une auto orientée grand tourisme. Et pour le coup, ils ne devraient pas être déçus !