Dossiers

Retour sur la DeLorean DMC-12 : éphémère, puis légendaire


En plus d’être la date du 33ème anniversaire de notre rédac-chef préféré (que j’embrasse au passage…), le 21 octobre 2015 est un jour un peu spécial pour tous les fans de la mythique série des Retour vers le Futur (et dieu sait qu’ils sont nombreux…). C’est en effet aujourd’hui que Marty McFly est censé revenir à Hill Valley.

DeLorean-DMC12-9

S’il est peut-être encore un peu tôt pour qu’il découvre des hoverboards à chaque coin de rue (même s’il parait que Lexus est sur le coup), il pourra toujours compter sur son fidèle destrier : sa légendaire Delorean DMC-12.

DeLorean-DMC12-2
Marty, en compagnie du loufoque Docteur Emmett Brown, plus connu sous le nom de « Doc »

L’occasion pour Blog-Moteur.com de vous raconter la genèse, la vie et la chute de cette icône des années 80.

DeLorean-DMC12-1
La DeLorean DMC-12

Tout commence en avril 1973. John Zachary Delorean, l’un des hommes à qui l’on doit la mythique Pontiac GTO, et qui y occupe alors un poste de direction, démissionne de General Motors, avec la ferme intention de fonder sa marque automobile, et de présenter « sa » voiture.

Delorean-DMC12-19
John Zachary Delorean

Plutôt que de payer une fortune une équipe de « marketeux » afin de trouver un nom vendeur, John fait dans la simplicité, et nomme son entreprise la DeLorean Motor Company. La société est fondée en 1975, et le nom de l’auto est trouvé dans la foulée. Lui aussi sera d’une simplicité enfantine : DMC-12 : DMC pour les initiales de l’entreprise, 12 pour 12 000 $, le prix de vente prévu à l’origine.

S’il envisage au départ de lui greffer un moteur rotatif Wankel, il se rabat rapidement sur l’idée d’un V6 Européen. Alors que les excellents blocs ne manquent pas (on pense notamment au superbe V6 Busso de chez Alfa-Roméo), John jette son dévolu sur le V6 PRV (pour Peugeot-Renault-Volvo), qui traîne déjà à l’époque une réputation de moteur boiteux, et qui sera ici associé à une boite mécanique à 5 vitesses, ou une ZF automatique à 3 rapports (oui oui, 3 rapports…).

DeLorean-DMC12-12

Les premiers prototypes prennent la route en 1976, et, les problèmes de développement s’accumulant, décision est prise de se rapprocher de Lotus, afin de bénéficier d’un « coup de main » salvateur. Le fondateur de la marque, Colin Chapman, reprend alors tout à zéro, et décide d’adopter le chassis-poutre et les suspensions de l’Esprit. Le design de l’auto est confié à Giugiaro. L’objectif est simple : marquer les esprits. Là dessus, le pari sera réussi…

DeLorean-DMC12-5
Avec ses portes papillon, la DMC-12 a surpris tout le monde

S’il devait au départ avoir lieu sur l’île de Porto-Rico, l’assemblage de l’auto aura finalement lieu en Irlande du Nord, dans la banlieue de Belfast. Le pays est alors en proie à une quasi guerre civile, et toute nouvelle entreprise créatrice d’emplois est bonne à prendre. Les larges aides financières accordées par le gouvernement anglais n’ont pas du être étrangères à la décision de Delorean… Si la construction de l’usine est achevée en 1978, il faut attendre janvier 1981 pour que les premières autos tombent des chaînes de production.

Delorean-DMC12-18

Les premiers essais mettent en avant l’équipement pléthorique de l’auto, qui offre de série la climatisation, la sellerie cuir, vitres électriques, ou encore la direction assistée. En revanche, la finition est indigne, surtout sur les premières séries. Ainsi, toutes les autos importées aux Etats-Unis devront être reconditionnées avant d’être livrées à leurs clients. Inacceptable, d’autant plus que le prix de l’auto a grimpé en flèche : des 12.000 dollars prévus à la base, il a finalement grimpé à 25.000 dollars (environ 65.000 dollars actuels…).

DeLorean-DMC12-20

Surtout, les performances ne sont pas en adéquation avec la ligne de l’auto. Il faut dire que son V6, qui développe 130 ch (pour une auto qui pèse 1,3 tonne, ce qui n’a rien de folichon, même à l’époque…), paraît bien maigre pour une auto « sportive ». Franchissant difficilement la barre symbolique des 200 km/h, l’auto met surtout plus de 10 secondes pour passer de 0 à 100 km/h (10,5 secondes pour être précis)… Déjà pas très performant de nature, la V6 PRV est ici étouffé par les sévères normes de dépollution américaines.

DeLorean-DMC12-22

Tout cela conduit à des ventes décevantes, malgré une communication un brin grandiloquente, qui vante la voiture comme révolutionnaire… Delorean se retrouve vite la corde au cou. Il faut dire que l’investissement total est colossal : 175 millions de dollars (dont 100 millions de dollars fournis par le gouvernement britannique), et qu’il manque encore 50 millions de dollars à la compagnie pour continuer son activité. Hors de question pour les anglais de remettre au pot (la Dame de Fer, alias Margaret Thatcher, qui était alors au pouvoir, a dit non) : Delorean est dans une impasse.

C’est sans doute pour essayer de sauver son entreprise qu’il va commettre l’irréparable. Le 19 octobre 1982, Delorean est arrêté à sa sortie de l’hôtel Sheraton de New-York par le FBI pour trafic de cocaïne, et blanchiment d’argent. Un enregistrement vidéo prouve en effet qu’une transaction  autour d’une « valise de Coke » à 24 millions de Dollars a eu lieu entre Delorean et un homme d’affaires véreux. L’homme, brisé, est incarcéré, et tout le monde lui tourne alors le dos. Sa société n’y survivra pas, et sa faillite est déclarée fin novembre 82. Les voitures invendues s’entassent alors par dizaines.

Delorean-DMC12-17
La production totale est de 8.583 exemplaires. Ce n’est qu’au prix que de généreuses ristournes que les derniers exemplaires seront écoulés en 1984.

Au final, les tribunaux prononceront une ordonnance de non-lieu à l’encontre de John Delorean, estimant qu’il a fait l’objet d’un « piège » tendu par les agents fédéraux, destiné à le faire tomber. Ce dernier, ruiné, restera quand même poursuivi par ses créanciers jusqu’à sa mort d’une crise cardiaque, en 2005.

DeLorean-DMC12-11
L’oeuvre d’une vie, la DMC-12 sera aussi la raison de la chute de Delorean